Tout ce qui nait vient à mourir
avec le temps ; sous le soleil
nulle chose ne reste vive.
S’évanouissent douleurs et peines,
les esprits des hommes, leur verbe.
Quant à nos anciennes lignées,
autant dire ombres au soleil, au vent fumé.
Comme vous nous fûmes des hommes,
tristes et joyeux, comme vous ;
et maintenant, vous le voyez, nous sommes
de la terre au soleil, sans vie.
Toute chose vient à mourir.
Jadis nos yeux étaient intacts,
chaque orbite avait sa lumière ;
ils sont affreux, vides, éteints :
voilà ce que le temps apporte.
*
Chiunche nasce a morte arriva
nel fuggir del tempo; e ’l sole
niuna cosa lascia viva.
Manca il dolce e quel che dole
e gl’ingegni e le parole;
e le nostre antiche prole
al sole ombre, al vento un fummo.
Come voi uomini fummo,
lieti e tristi, come siete;
e or siàn, come vedete,
terra al sol, di vita priva.
Ogni cosa a morte arriva.
Già fur gli occhi nostri interi
con la luce in ogni speco;
or son voti, orrendi e neri,
e ciò porta il tempo seco.
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Michel-Ange (1475-1564) – Poèmes (Poésie/Gallimard, 1992) – Traduit de l’italien par Pierre Leyris.