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Publié le 12 janvier 2022 par Morduedetheatre @_MDT_
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Critique de Coupures, de Paul-Eloi Forget et Samuel Valensi, vues le 8 janvier au Théâtre de Belleville
Avec June Assal, Michel Derville, Lison Favard, Paul-Eloi Forget, Valérie Moinet et Samuel Valensi, dans une mise en scène de Paul-Eloi Forget et Samuel Valensi

J’ai toujours adoré la deuxième rentrée théâtrale, celle de janvier, mais là il faut reconnaître qu’elle est particulièrement bienvenue : il fait froid, la situation sanitaire est celle qu’on connaît tous, l’ambiance globale est morose mais ce petit renouveau de programmation, les affiches qui changent sur les colonnes Morris, la découverte des créations à venir, tout cela met un petit coup de boost bienvenue en cette étrange période. Coupures faisait partie de ma sélection de spectacles à voir en cette rentrée 2022, et je suis absolument ravie de vous annoncer que je commence avec le jackpot.

Fidèle à mes principes, je n’ai rien lu ou presque sur Coupures avant de découvrir le spectacle. J’avais quand même compris que le spectacle abordait la question de la 5G, ce qui n’était pas franchement pour me rassurer – le débat est certes intéressant, mais je ne voyais pas où pouvait se nicher la théâtralité dans un sujet pareil. En fait, la pièce est bien plus maligne que moi : la 5G n’est qu’un prétexte pour aborder la question de la démocratie, du gouvernement représentatif et de la place de la voix de chaque individu là-dedans.

La position du spectateur est définie dès le début : nous voilà citoyens de la commune dans laquelle se déroule la pièce. Nous allons chercher à comprendre pourquoi le maire écolo de la ville a accepté d’installer des antennes 5G, puis nous pourrons nous exprimer, par le vote, à partir des différents éléments qui nous auront été donnés. Et nous voilà d’emblée engagés dans le spectacle.

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© Jules Despretz

Je suis La Poursuite du Bleu depuis quelques temps déjà : le premier spectacle de la compagnie, L’inversion de la courbe, était plein de promesses, mais j’avais été déçue par Melone Blue, leur deuxième spectacle qui parlait d’écologie. Avec Coupures, ils visent vraiment en plein dans le mille. Ils poursuivent leur ambition de théâtre engagé en évitant les écueils présents dans les deux premiers spectacles : cette fois-ci la pièce n’est pas seulement politique, elle est avant tout dramatique. Et c’est pour ça que ça fonctionne si bien.

Politiquement, on commence à les connaître et on sait que le fond sera là. Le spectacle mène de front les problématiques de la démocratie et de la 5G : d’une part en faisant apparaître les nombreuses strates institutionnelles et en soulignant les complexités de l’administration française, d’autre part en donnant la parole à tous les métiers impliqués dans le déploiement des antennes – le tout est informé mais accessible, pas du tout hors sol ni démago, et présenté avec un mélange d’humour et de cynisme parfaitement dosé.

Théâtralement, c’est une grande réussite. Le spectacle est mené à un rythme de dingue, les scènes s’enchaînent sans aucun temps mort, les réponses aux questions des spectateurs arrivent au bon moment pour les renvoyer immédiatement sur un terrain qu’ils n’attendaient pas, tout est parfaitement ficelé, tout est parfaitement fluide, tout est parfaitement parfait. La mise en scène se veut simple, mais surtout ultra efficace, participatif juste ce qu’il faut, elle sert complètement le propos sans aucune fioriture. Mention spéciale pour la musique qui accompagne le spectacle, originale et toujours dans la bonne tonalité, qui permet des changements d’ambiance instantané pour notre plus grand bonheur.

La réussite de ce spectacle, pour moi, réside dans l’engagement du spectateur. On est tout de suite happés par les propos de l’un des personnages, puis on est frappés de plein fouet par les différents points de vue qui reconstituent le cheminement de l’acceptation de ces antennes. En fait, à cette histoire très politique se retrouvé mêlé un propos assez universel autour de l’histoire personnelle du maire qui permet une implication totale du spectateur, intellectuelle et émotionnelle. Il faut dire aussi que Samuel Valensi et Paul-Eloi Forget ont réuni une équipe incroyable, défendant leurs personnages avec un engagement total, aussi convaincus que des politiques en campagne.

Et, envoutés, nous voilà debout à la fin du spectacle, militants à notre tour, cherchant à le faire connaître.

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© Jules Despretz

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