C’est [la poésie] une puissance à moitié assoupie sur son bras droit
Les éditions poesis ont produit un volume finement dessiné, composé d’extraits de la correspondance de John Keats puis d’un choix de poèmes. Conception judicieuse, bipartition active. La poésie de la terre ne meurt jamais ; lui, John, atteint de tuberculose, sait qu’il va mourir (à Rome, où il tentait d’échapper à son mal, en 1821).
En France, en cette année 1821, où en sommes-nous ? Sous la Restauration et Louis XVIII, Napoléon ayant été défait par Wellington. Dans une lettre à sa sœur Fanny, en août 1819, le poète disait : « je peux passer un été très calmement sans beaucoup me soucier du gros Louis, du gros Régent ou du duc de Wellington. » Dans l’été ou en hiver, dans la région des Lacs ou dans le jardin d’Hampstead, demeure l’intelligence du paysage, sa tonalité intellectuelle : « Ce qui m’étonne plus que tout le reste, c’est la tonalité, la couleur, l’ardoise, la pierre, la mousse, le varech ; ou, si je puis m’exprimer ainsi, l’intelligence, l’expression de ces endroits. » (Lettre à son frère Thomas, juin 1818).
Le lecteur pensera peut-être à un autre anglais, G. M. Hopkins. La mobilité de Keats est extrême, il est capable de l’anecdote (Pourquoi ai-je ri ce soir ?) comme de la légende (Ode à une urne grecque) :
« La Beauté est vérité, la vérité Beauté --- c’est tout
Ce que tu sais sur terre et tout ce que tu as besoin de savoir »
Plutôt qu’anéantir, choisir.
Claude Minière
John Keats, La poésie de la terre ne meurt jamais, traductions de Thierry Gillyboeuf et Cécile A. Holdban, avant-propos de Frédéric Brun. Editions Poesis, 2021, 122 p. 16€