Cela fait plus de vingt ans que j'écris sur le changement. Mais cela fait aussi vingt ans que je ne parviens pas à me faire comprendre.
Petit à petit, j'en arrive à penser que c'est une question d'idées préconçues. Tout d'abord, nous estimons que le changement est une question d'individu, alors que c'est une question de société.
Par exemple, le gouvernement pense que si l'entrepreneur français est moins performant que l'Allemand, du fait de sa mauvaise volonté. En fait, toute l'Allemagne n'est qu'une équipe. Et c'est l'équipe qui fait le champion, et surtout les champions.
Une autre idée préconçue semble être que, le changement est une question d'idée. J'installe un logiciel, et la société est transformée. Eh bien non, comme dans la théorie du chaos et son battement d'aile de papillon, la réussite du changement tient à des effets microscopiques. Chaque membre d'une entreprise, par exemple, peut faire échouer un changement. Qui étaient Mao ou de Gaulle avant d'être ce qu'ils sont devenus ? Des riens du tout. Mais ils avaient des volontés de fer. Et ils ont fait plier les empires les plus puissants du monde. Plus forts que la Guerre des étoiles !
C'est là que se trouve le principe même de la conduite du changement. Il s'agit de maîtriser la complexité. Il faut s'assurer que tous les Mao ou de Gaulle en puissance vont s'enthousiasmer pour votre changement. D'où le problème du changement : on ne peut pas mettre un policier (un consultant) derrière chaque membre de la société ! Nouvelle erreur due au préjugé individualiste. Une société n'est pas faite d'individus, mais de systèmes (code de la route, politesse sont mes exemples favoris). Ce sont ces systèmes qui règlent nos comportements collectifs. Quand on les a compris, et qu'on les utilise correctement, la société bouge comme un seul homme.