Le gros titre d'hier se passe de traduction.
Même le jeu de mots se comprend
et Christine Lagarde en prend pour son grade !
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A la suite d’une enquête interne, qui a donné lieu à un rapport
public de 135 pages, conduit par un expert norvégien, le FMI vient
de reconnaître qu’il n’aurait jamais dû accorder à l’Argentine
le méga-prêt qu’il lui a fait à la mi-2018 à la demande du
président d’alors, Mauricio Macri, appuyé par un certain nombre
d’alliés politiques en mesure de peser sur l’institution
ailleurs dans le monde.
Rien sur la une de La Prensa hier
A la place du rapport, la mention du quota de remboursement
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Un prêt qui par ailleurs a été contracté par l’Argentine en
extrême urgence, sans débat ni vote au Congrès, ce qui contrevient
à la constitution nationale. Sans tentative non plus de restructurer
la dette pour éviter l’insolvabilité nationale. Une légèreté
certaine dans le chef d’un homme d’État qui a laissé une dette
écrasante derrière lui et en joue aujourd’hui contre le
gouvernement qui lui a succédé.
Clarin préfère mélanger les deux
"Le gouvernement [au lieu de l'Argentine] a payé
1.855 millions de dollars US et le FMI
a émis une critique contre Macri"
"Une" critique... c'est pas bien méchant !
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Pour couronner le tout, ces sommes démentielles ont servi à payer
des entreprises privées qui ont ensuite abandonné le pays, ce qui
est exactement l’inverse de ce pourquoi le FMI est censé
intervenir auprès des États membres en difficulté. Le rapport
reconnaît aussi que le FMI n’a pas prêté l’attention qu’il
aurait fallu à l’emploi qui allait être fait de cet argent.
L’Argentine est à présent écrasée sous une dette impossible à
rembourser, qui empêche, crise sanitaire aidant, le gouvernement de
mener la politique d’investissement et de développement promise
par Alberto Fernández, démocratiquement porté à la présidence en
octobre 2019 (après une élection incontestable) pour une prise de
fonction le 10 décembre suivant, soit trois mois avant que la
pandémie atteigne l’Argentine alors en pleine rentrée australe,
au mois de mars.
"Evaluation critique du FMI sur le prêt fait
au gouvernement de Macri"
Remarquez là aussi la confusion entre l'Etat et le gouvernement
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Les journaux de droite sont passablement discrets sur le sujet, à
moins qu’ils n’en fassent une analyse ambiguë, tandis que
Página/12 en fait sa une hier et
aujourd’hui (1).
Si ce rapport était sorti avant les élections de mi-mandat, la
défaite de l’actuelle majorité n’aurait peut-être pas eu lieu.
En tout cas, elle aurait été de bien moindre ampleur avec des
électeurs informés des tenants et des aboutissants sur la dette et
l’inflation qu’elle entraîne (2).
Pour la énième fois, il y a de quoi se demander à quel jeu malsain
pour la démocratie joue le FMI.
La une d'aujourd'hui avec un jeu de mot
qui se passe de traduction
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Diverses instances en Argentine demandent à présent que ce rapport soit versé au dossier de l’instruction judiciaire qui implique Mauricio Macri à la suite de cet endettement anticonstitutionnel, d’autant qu’il est soupçonné d’avoir aussi favorisé la fraude fiscale et l’évasion de capitaux de certains membres de son cercle politique et financier quand il était aux affaires, ce qu’il admet d’ailleurs à demi-mot, non sans cynisme, dans ses interviews récentes (3). C’est lui-même qui avait révélé il y a quelques semaines que l’argent du FMI, dont on cherchait vainement depuis deux ans dans quoi il avait bien pu être investi, avait en fait servi à rembourser des entreprises étrangères qui souhaitaient alors cesser leurs activités en Argentine. Et Macri ne voit pas où est le mal !
© Denise Anne Clavilierwww.barrio-de-tango.blogspot.com
Pour aller plus loin :
lire l’article principal de Página/12 aujourd’hui
lire l’article de La Prensa aujourd’hui
lire l’article de Clarín du 22 décembre
lire l’article de La Nación du 22 décembre (il s’agit d’une mise à jour Internet après 20 h et non repris comme tel dans l’édition papier du lendemain) (4)
(1) En ce qui concerne La Nación, l’article de une d’hier
n’apparaît plus en tant que tel sur le site du journal. Or ce
quotidien vient de se faire épingler vertement par l’archevêque
de La Plata pour avoir dénaturé ses propos et avoir prétendu, à
partir d’une interprétation erronée de ces derniers, que l’Église
(dans son ensemble) s’opposait à la mise en place du passe
vaccinal, ce qui est faux (elle n’a tout simplement pas les moyens
logistiques d’assurer ce contrôle et ne peut pas, par nature,
empêcher un fidèle, même non vacciné, de participer à une messe.
Elle demande donc à l’État de se charger du contrôle s’il
souhaite l’imposer).
(3) L’homme multiplie d’ailleurs ces jours-ci les petites phrases agressives à l’égard du gouvernement et des publics précaires de la société qu’il traite de personnes vivant aux crochets de la collectivité.
(4) Hier, il fallait aller jusqu’en page 16 pour lire le premier article sur le sujet ! Lequel occupe deux pages en tout et pour tout, réparties sur trois feuilles avec de la publicité au milieu.