Dans la grisaille de son studio qui donne sur le boulevard périphérique, elle ferme les yeux et se souvient d’Oulan-Bator. Elle se souvient de ces chiens figés dans l’éternité dont les crocs proéminents maintenaient une épaisse chaîne aux maillons d’acier qui dessinait une balançoire. Elle s’y était assise elle aussi, juste un moment, pas vraiment pour se reposer, plutôt pour oublier les cheminées des industries et les tours du centre-ville. Elle s’y était assise pour rêver aux plateaux sauvages de la Mongolie profonde dont elle jurait déjà sentir les odeurs de ciboulette sauvage et d’armoise.