" Sa mémoire immédiate est intacte. Le reste est noir. Son esprit porte le voile noir des veuves. Il en a croisé parfois. Elles lui font peur. Ces grands fantômes, ces spectres, il s'en méfie, il a peur qu'ils l'emmènent là où il ne guérira pas. " (Valérie Perrin, "Les Oubliés du dimanche", éd. Albin Michel, 2015).
C'est une histoire triste parmi les autres, mais qui engendre beaucoup de colère contre tous les complotistes des réseaux sociaux qui découragent les Français (et les autres) d'aller se faire vacciner. Elle a été rendue publique ce samedi 11 décembre 2021 mais elle n'est hélas pas la seule. Une femme de 54 ans qui s'était présentée à l'hôpital avec un faux passe sanitaire est morte d'une forme sévère du covid-19.
Parce que les médecins avaient cru que la patiente était vaccinée, ils ont recherché ailleurs la cause de son mal et ils ont perdu beaucoup de temps qui aurait pu la sauver. Son mari ne savait pas qu'elle s'était fait faire un faux passe sanitaire, c'est-à-dire un certificat de complaisance réalisé par un médecin voyou qui non seulement, pour de l'argent, a trahi la loi et la déontologie, mais a aussi provoqué la mort d'au moins une personne, j'écris "au moins" car si son affaire frelatée aux faux passes sanitaires concerne des centaines voire des milliers de personnes, malheureusement, cette femme pourrait ne pas être la seule. Elle était la mère d'un enfant de 13 ans et son mari, effondré, a décidé de déposer plainte pour homicide.
S'il y a une loi qui oblige le passe sanitaire dans certains lieux publics, c'est parce que justement, une simple recommandation ne suffit pas, cet événement tragique l'illustre, alors que la vaccination est gratuite et l'achat d'un faux passe sanitaire très coûteux. La raison d'un tel sacrifice financier, surtout avant cette période de fêtes qui sont chères pour les ménages, est surtout un endoctrinement dans les réseaux sociaux par des arguments complètement bidon, faux et dangereux. Comme on le voit, ces faux arguments parfois jetés avec légèreté ne sont pas sans conséquences et chacun à son niveau, dans son expression, devrait peser un peu plus les conséquences de ce qu'il avance.
Il faut savoir que la dernière loi de vigilance sanitaire est devenu très sévère contre ceux qui sciemment veulent tromper la société en créant un délit : " portant sur le fait d'utiliser, d'établir, de transmettre ou de proposer un faux passe sanitaire " sanctionné d'une peine de cinq d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Cela devrait faire réfléchir les médecins véreux.
Mais il faut aussi savoir que les "victimes", car ceux qui achètent ces faux passes sanitaires sont victimes, ne risquent rien à dénoncer celui qui leur a proposé voire vendu un tel faux passe sanitaire : ils ne seront pas poursuivis. Il faut qu'ils le sachent s'ils veulent faire arrêter cette désastreuse machinerie de la mort pour le seul profit pécuniaire de quelques-uns (procédé qui n'a rien de complotiste ni d'idéologique, d'ailleurs, la plupart de ceux qui prônent la non-vaccination sur les réseaux sociaux sont eux-mêmes vaccinés mais engrangent des revenus avec l'audience très élevée de leur site Internet).
L'Assurance maladie a indiqué qu'elle avait déjoué environ 40 000 faux passes sanitaires depuis le mois de septembre 2021. Il ne faut pas se tromper sur la nature du faux passe sanitaire. La motivation n'est pas politique mais économique, s'enrichir sur le dos de la santé des personnes. Un faux passe sanitaire peut conduire à la mort, et c'est le même procédé dégueulasse que les passeurs de réfugiés dans les mers (Méditerranée, Manche, etc.), proposant pour des prix exorbitants un rafiot qui a de grands risques de ne pas finir la traversée. Mais les passeurs s'en moquent de ces tragédies humaines, ils ont l'argent des victimes ; leur vénalité est comptable des morts qui en résultent, ce sont des meurtres. Délivrer un faux passe sanitaire est aussi scandaleux, aussi dégueulasse, aussi meurtrier.
Avec entre 50 000 et 60 000 nouveaux cas détectés chaque jour depuis une dizaine de jours, nous sommes en plein dans la cinquième vague. La montée du nombre des hospitalisations et des admissions en réanimation est très forte. Deux sources d'optimisme sont cependant à noter : le taux effectif de reproduction, le "fameux" R0 (la dérivée seconde du nombre de cas, c'est-à-dire la pente de la pente, ou son accélération) est en train de redescendre depuis deux semaines. Au plus fort, le 20 novembre 2021, il était à 1,59 et au 4 décembre 2021, il est à 1,42 ; c'est encore bien trop haut car tant qu'il est au-dessus de 1,00, l'épidémie s'aggrave, mais cette baisse laisse entendre que l'aggravation est de moins en moins forte, et on le voit aussi sur le taux d'incidence qui est de 519 nouveaux cas pour 100 000 habitants (ce qui est énorme), et en hausse de seulement 19% en une semaine alors qu'il avait bondi de 50% à 100% les semaines précédentes.
L'autre source d'optimisme, c'est évidemment cette nouvelle course à la montre qu'est la généralisation de la troisième dose, cette dose de rappel au bout du cinquième et sixième mois, et plus globalement, de la vaccination en général : curieusement, le gouvernement a toujours commencé à avancer à reculons avant de, enfin, foncer. C'était le cas pour le début de la campagne de vaccination en janvier 2021. C'était le cas aussi pour cette dose de rappel qu'il a recommandé du bout des lèvres, jusqu'à ce qu'elle soit désormais imposée pour maintenir valide son passe sanitaire (pour les plus de 65 ans, le passe sanitaire ne sera plus valide à partir du 15 décembre 2021 si la dose de rappel n'a pas été injectée dans les sept mois après la deuxième dose ; pour les autres, cette mesure s'appliquera à partir du 15 janvier 2022). Et c'est le cas enfin de la vaccination des enfants de 5 à 12 ans, possible à partir du 15 décembre 2021, d'abord uniquement pour les enfants avec comorbidités, et quelques jours plus tard, cette mesure sera enfin généralisée, comme cela s'est passé en Israël et aux États-Unis.
Parallèlement aux fortes incitations du gouvernement, il fallait aussi assurer au niveau logistique. Comme toujours, des gens ont râlé car au début de cette nouvelle campagne de vaccination, certains rendez-vous étaient fixés au mois de janvier, faute de mieux. 200 centres de vaccination ont rouverts depuis quelques jours et les médecins, les pharmaciens, les infirmiers contribuent aujourd'hui beaucoup plus qu'il y a huit mois à l'effort national parce que les conditions de stockage des vaccins se sont assouplies. Dans beaucoup d'officines (pharmacies) et même dans certains centres de vaccination, voire centres commerciaux, on peut venir se faire vacciner, première dose comme dose de rappel, sans rendez-vous. On est loin de la pénurie de doses du printemps dernier. Le gouvernement a même encouragé les pharmacies à ouvrir les dimanches de décembre pour permettre la vaccination massive.
La situation à ce jour est très impressionnante. Il y a eu 780 000 doses injectées le vendredi 10 décembre 2021. Chaque jour, ce chiffre augmente comme le montre ce tableau de CovidTracker.fr (le nombre quotidien des doses injectées).
Au 10 décembre 2021, il y avait donc 52 248 386 personnes ayant reçu au moins une dose (77,5% de la population totale, soit 90,6% de la population éligible), 51 172 620 personnes ayant reçu deux doses (ou ayant été complètement vaccinées) et 13 766 535 personnes ayant reçu la dose de rappel (20,4% de la population totale, soit 23,9% de la population éligible). C'est déjà beaucoup et on peut imaginer que l'objectif très ambitieux du gouvernement a des chances d'être atteint, à savoir 25 millions de doses de rappel avant Noël (c'est très ambitieux car il ne reste plus que deux semaines, mais le rythme est là).
C'est une course de vitesse puisque la baisse d'efficacité en pleine période épidémique est une catastrophe (contamination, transmission, réanimation pour les formes graves). La chance, c'est que la protection est renforcée quasiment immédiatement après la dose de rappel (après un ou deux jours), au contraire des deux premières doses avec plusieurs semaines de décalage.
Et même si la dose de rappel est nécessaire pour "booster" le système immunitaire (comme on dit), il n'y a pas de comparaison entre cette vague épidémique qui vaut la deuxième vague de novembre 2020 et ses conséquences sur le nombre d'hospitalisations et d'admissions en réanimation qui est beaucoup moindre qu'en automne 2020 (ainsi que le nombre de décès mais nous sommes encore loin du pic de cette vague, hélas).
C'est ce qu'a voulu montrer le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal en venant ce samedi 11 décembre 2021 dans la matinée au centre commercial de Vélizy 2, l'un des grands centres commerciaux de la région parisienne. En effet, c'est là qu'il s'est fait injecter sa dose de rappel, et en choisissant le vaccin Moderna, alors qu'il a lui-même 30 ans, il a voulu signifier qu'il n'y avait pas de risque à le prendre (depuis quelques semaines, les personnes veulent du Pfizer et pas du Moderna). D'ailleurs, il n'y a qu'en France que des patients demandent une marque déterminée de vaccin, à l'étranger, ils laissent le choix aux médecins qui sont plus compétents qu'eux pour ce faire.
Bien entendu, on ne manquera pas de remarquer que le ministre est venu dans la commune où vote la candidate LR à l'élection présidentielle Valérie Pécresse, ancienne députée des lieux de 2002 à 2016. Du reste, depuis 2020, Valérie Pécresse est également conseillère municipale de Vélizy-Villacoublay, dont le maire depuis mars 2014, Pascal Thévenot, l'un de ses proches, lui avait succédé comme député le 20 mars 2016 avec la triple investiture LR-UDI-MoDem, et ce dernier s'est fait battre en juin 2017 par le candidat du MoDem Jean-Noël Barrot.
Le hasard a fait que je me suis retrouvé dans ce centre commercial de Vélizy 2 quelques heures après la venue de Gabriel Attal. Je n'avais aucune envie de me retrouver ainsi dans un flot des consommateurs un week-end d'avant Noël mais j'avais une obligation personnelle (et médicale) pour y aller. J'ai pu constater qu'effectivement, il était possible tant de se faire tester que de se faire vacciner sans rendez-vous, et la file d'attente avait environ une trentaine de personnes (je ne sais pas ce que cela signifie en durée, car je ne sais pas combien il y avait de postes de vaccination).
Mon sentiment est partagé. D'une part, je trouve excellent cette capacité à offrir aux chalands de faire sa dose de rappel au milieu des courses (attention néanmoins à se ménager du repos dans les jours qui suivent, on peut se retrouver dans un fort état grippal avec fièvre assommante pendant un ou deux jours). D'autre part, ce centre commercial, probablement comme les autres, est un évident nid à virus, dans la mesure où plus de la moitié des gens ne respecte aucune distanciation physique ni ne porte correctement le masque, le nez dégagé si ce n'est le masque baissé jusqu'au cou.
C'est malheureux à dire, mais il n'y a pas de demi-mesure : ou il n'y a aucune épidémie, il n'y a quasiment aucune vigilance (malgré les panneaux au sol, ou verticaux, les directions du centre de vaccination, de dépistage, qui rappellent qu'on est en pleine vague épidémique), ou on reconfine et le centre commercial est fermé. Et sans risque. Cela explique les mesures précédentes de confinement. On pourrait imaginer une solution intermédiaire où les gens sont respectueux des autres en gardant le masque et en gardant une certaine distance, mais c'est trop leur demander.
Pourtant, plus de 100 personnes meurent chaque jour du covid-19 en France et cela va sans doute augmenter les prochains avec une forte progression (en Allemagne, ce sont près de 500 décès par jour, niveau que je pense qu'on n'atteindra pas car une partie de l'Allemagne de l'Est a été peu vaccinée). Si on pensait au risque (dont il ne faut pas avoir peur), on aurait la vigilance pour ne pas contaminer les autres.
Le gouvernement a fait le "pari" (je n'aime pas trop ce mot) de ne prendre quasiment aucune mesure de reconfinement pour cette très forte cinquième vague en pensant avec raison que la vaccination nous protégera d'autant plus que la dose de rappel sera généralisée. On peut reprocher à Emmanuel Macron de ne pas se déclarer candidat, et il est vrai qu'à moins de quatre mois du premier tour (10 avril 2022 !), il serait certainement temps, mais franchement, vous croyez qu'il en est déjà là quand un pays est en tel danger épidémique ? Qu'on ne sait pas ce qui se passera à Noël d'un point de vue épidémique. Sans compter les considérations économiques et la Présidence française du Conseil de l'Union Européenne, le gouvernement ne peut pas se payer le luxe de faire campagne dès maintenant : il a encore trop de travail !
Et la réussite de la lutte contre la pandémie de covid-19, elle ne sera pas attribuée au gouvernement, mais à l'ensemble des Français. C'est pourquoi, hors de toute considération politique, les Français doivent garder leur vigilance pour préserver les personnes les plus fragiles, et c'est une roulette russe, cette femme de 54 ans qui avait voulu se faire passer pour une personne vaccinée, je suis persuadé qu'elle se croyait invincible et certainement pas une "personne fragile". Donc, la conclusion, ce n'est pas la peur, mais la raison, le sens des responsabilités, et finalement, la vigilance. Heureusement, 90,6% des personnes éligibles en font preuve aujourd'hui, c'est rassurant et très prometteur pour l'avenir de ce beau pays qu'est la France. Protégez-vous et protégez vos proches !
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (11 décembre 2021)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Faux passe sanitaire mortel et dose de rappel salutaire.
Gabriel Attal.
Cinquième vague : de nouvelles restrictions sanitaires ce lundi 6 décembre 2021 ?
Professeur Bertrand Guidet.
Troisième dose et fulgurance.
Confinement ou obligation vaccinale : faut-il écouter le docteur Martin Blachier ?
Martin Blachier.
La France d'Emmanuel Macron.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron, le 9 novembre 2021 à Paris (texte intégral et vidéo).
Témoignage : je suis (presque) vacciné !
Témoignage : au cœur d'un centre de vaccination contre le covid-19 (1).
7 idées fausses sur le passe sanitaire.
Covid-19 : 5 millions de décès dans le monde et la 5e vague en France ?
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Covid-19 : comprendre la situation épidémique en Israël.
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20211211-covid-eu-faux-passe-sanitaire.html
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