Il y a toujours quelque chose de nouveau au parti socialiste. Au-delà de la multiplication des candidatures au poste de Premier Secrétaire, abondamment relatée par les grands médias, la vraie nouveauté du premier semestre 2008 aura été la constitution au sein du PS du Pôle écologique. Entité informelle, le Pôle regroupe des élus, personnalités ou simples militants, issus de différents courants. Tous partagent le constat de la simultanéité et de la convergence des crises environnementale et sociétale ainsi que de l’urgence à apporter des réponses à travers une ligne politique clarifiée et cohérente. Le dépôt d’une contribution dans le cadre du congrès de Reims atteste de la détermination de ses initiateurs à vouloir faire bouger les lignes.
Difficile de trouver un écho dans la presse quand on ne dispose pas de personnalité nationale. Le pôle écologique en fait l’expérience mais, c’est loin d’en troubler ses animateurs. Sa crédibilité nationale, il la trouve toutefois dans la poignée de parlementaires et de responsables nationaux du PS qui le constitue : Christophe Caresche, député de Paris, Nicole Bricq, sénatrice de Seine-et-Marne, Philippe Plisson député de Gironde, Géraud Guibert, secrétaire national à l’environnement …
Longtemps réduit à un simple groupe de réflexion au sein des instances du PS, les membres du Pôle ont su habilement se saisir du chantier de la nouvelle déclaration de principes adoptée par le parti en juin. Cette dernière marque de réelles avancées dans la prise en compte des enjeux environnementaux. Une vraie évolution qui est le fruit de leur capacité intellectuelle à peser sur le fond et à convaincre, notamment en l’espèce Alain Bergounioux , co-rédacteur avec Henri Weber de la déclaration de principes et par la suite les différentes instances du PS.
La démarche ne pouvait s’arrêter en si bon chemin. A sa façon, en dépassant les courants traditionnels, le Pôle participe à la recomposition de la vieille maison socialiste et surtout à revisiter le message de cette dernière. « Une mise à jour du logiciel socialiste » confie Eric Loiselet, premier fédéral de Haute Marne et cheville ouvrière du Pôle.
Soucieux de capitaliser les avancées de la déclaration de principes et de peser sur les orientations futures du PS, les dirigeants du Pôle ont franchi le Rubicon en déposant une contribution. En d’autres temps, elle aurait été thématique. Cette fois témoin que les choses changent, elle est générale. La jonction est enfin faite entre les questions environnementales, autrefois réservées à quelques spécialistes, et les questions de société relevant d’un traitement politique.
Assez des arbitrages toujours défavorables pour des raisons de circonstances. Eric Loiselet en est persuadé, le PS gagnera à clarifier les choses, à mettre fin aux positions non tranchées. Au nom d’un consensualisme érigé en mode de gouvernance le PS a étouffé le débat et donc le fond. A l’inverse, le Pôle écologique aspire à des débats larges et en profondeur comme sur la politique énergétique par exemple.
« Ne rien faire, c’est renoncer à faire de la politique », « notre objectif est de clarifier sur une ligne politique cohérente » figurent ainsi en gage d’avertissement dans la contribution. La révolution verte prend des allures de révolution tout court dans un parti construit depuis deux décennies sur un cumul d’ambiguïtés. Un poil à gratter pour un parti d’élus enfermé dans un consensualisme électoraliste qui a fait le choix d’en dire le moins possible pour fâcher le moins possible.
Le Pôle écologique ne devrait pas être, au grand dam de quelques barons et éléphants, une simple opération de greenwashing de la rue de Solférino. « On sent un intérêt pour notre démarche » confie Eric Loiselet qui se félicite de la constitution plus aisée que prévue d’un réseau de mandataires départementaux.
Le succès de la démarche, ses initiateurs le reconnaissent, sera évalué à l’aune de la capacité du Pôle à peser sur le contenu des futures motions et notamment sur la motion finale dite de synthèse.
Si les membres du Pôle sont des socialistes tendance écolo, ils ont aussi une vision politique, « nous ne sommes pas des perdreaux de l’année » confient-ils. Volontaristes, ils aspirent à ce que leur parti reviennent aux affaires pour changer les choses car, ils en sont persuadés, derrière le gadget du Grenelle, Nicolas Sarkozy n’a rien d’écolo.
Un pari uniquement possible à leurs yeux que si se le PS se transforme en un grand parti de toute la gauche, réel rival de l’UMP capable de réunir 35% de suffrages. Du parler vrai et de l’ambition collective. Il y a bien quelque chose de nouveau au parti socialiste.