La bande-annonce m’avait convaincue que Pascal Elbé (que je ne connaissais pas comme réalisateur) avait conçu une sorte de feel-good cinématographique. Un peu à l’instar des romans de cette catégorie dont on sait à l’avance que les héros surmonteront leurs problèmes, ce qui est somme toute rassurant et encourageant.
On a besoin de s’identifier à des gens qui pourraient être nous et leur manière de s’en sortir est inspirante.
Antoine (Pascal Elbé) semble n’écouter rien ni personne : ses élèves (qui lui réclament plus d’attention), ses collègues (comme Claudia Tagbo qui n’aiment pas son manque de concentration), ses amours (qui lui reprochent son manque d’empathie), sa soeur (Emmanuelle Devos) et sa mère (Marthe Villalonga) ... Et pour cause : Antoine est encore jeune mais a perdu beaucoup d’audition. Seul son ami (François Berléand) parvient à le supporter. Sa nouvelle voisine Claire (Sandrine Kiberlain), venue s’installer temporairement chez sa sœur (Valérie Donzelli) avec sa fille après la perte de son mari, rêve de calme et tranquillité. Pas d’un voisin aussi bruyant qu’Antoine, avec sa musique à fond et son réveil qui sonne sans fin. Et pourtant, Claire et Antoine sont faits pour s’entendre !
J’ai adoré ce film qui ne se prend pas excessivement au sérieux. C’est une jolie comédie et pourtant le sujet est doublement sérieux puisque la malentendante touche 466 millions de personnes dans le monde (Source OMS) dont 10 millions de français soit 16 % de la population. Après 50 ans, une personne sur trois ont des difficultés auditives, et plus d’une sur deux après 80 ans.
La moitié d'entre eux reconnaissent des répercussions sur leur vie quotidienne. Pourtant seulement 19 % des personnes déclarant présenter des troubles de l’audition ont un appareil auditif. Ce taux est de 25 % chez les 65-84 ans et atteint 34 % chez les plus de 85 ans (Source : DREES).
Pascal Elbé en est lui-même victime. Il était donc très bien placé pour nous en parler. Et à juste titre il fait remarquer que la surdité est propice aux gags alors qu'il ne viendrait pas à l'esprit de se moquer de la vie quotidienne d'une personne qui perd progressivement la vue.
Le terme même de "malentendu" n'est-il pas synonyme d'incompréhension ? En tout cas le réalisateur a conçu un scénario riche en rebondissements mais relativement pauvre en dialogues. Son film est peu bavard, propice à l'introspection, ce qui est reposant et permet de se projeter dans cet homme qui a envie qu'on le laisse tranquille. C'est aussi prétexte à revoir les plages de Cabourg et d'Houlgate. Une sorte de bouffée d'air pur et d'authenticité sous couvert de comédie romantique.
Ceux qui voudraient en savoir plus sur ce fléau pourront lire La vie en sourdine de David Lodge qui, lui aussi, rapporte sa propre expérience depuis le déni jusqu’à l’acceptation.
On est fait pour s’entendre de Pascal ElbéAvec Pascal Elbé, Sandrine Kiberlain, François Berléand, Valérie Donzelli, Emmanuelle Devos, Claudia Tagbo, Marthe Villalonga …Réalisé en 2019En salle depuis le 17 novembre 2021