Une nouvelle bible en français sur le genre Beat, Garage, Freakbeat ? Non, plutôt un catalogue mémoriel de titres cultes. Donc, pas inintéressant pour autant.
Lorsque l’on voit la couverture de British Beat, American Beat, Freakbeat & Garage Rock 60’s.. on se dit : « tiens, y aurait-il eu une traduction des bouquins de Vernon Joynson Fuzz Acid and Flowers et Tapestry of Daylights, les classiques américains sur ces sujets là, que chaque collectionneur des genres sus-cités se doit de posséder ? Alors, on jette un œil, et là : surprise : on s’aperçoit qu’en fait : non, ce n’est pas une traduction, ni une adaptation, mais bien un livre à part, différent, qui a été conçu par Serge Morinais. Alors, de quoi s’agit-il ?
British Beat… est un épais bouquin de 390 pages, couverture couleur, broché, dos carré, comme le veut la tradition de l’éditeur Camion blanc, mais ne comprenant que du texte dedans, sans aucune photo ni illustration. Et pour cause, il s’agit en fait d’une anthologie de notices rédigées par l’auteur sur 350 « pépites » comme il l’écrit lui-même. Après 7 pages de prologue recontextualisant au mieux la période et le pourquoi de ce livre, tentant de faire partager un certain nombre de morceaux que l’auteur apprécie, de certains, grands classiques, (cela commence par « Some other Guy », puis enchaine sur « I Saw Her Standing There ») à d'autres, un peu plus Underground, passant par tout ce que la scène sixties Mod, Beat et ce que l’on appellera ensuite le sixties punk a produit de plus excitant, au niveau national pour les groupes concernés en tous cas. Car que ce soit pour la terre d’Albion ou l’outre Atlantique, ces titres là (des singles souvent) ont eu un certain succès, et l’auteur ne part pas dans un essai sur des pépites vraiment rares ou introuvables que l’on a pu, dés les années quatre-vingt, retrouver compilées dans des séries consacrées au sujet par des amateurs collectionneurs. Non, il lorgne plutôt, et surtout en grande partie dans les premiers chapitres, vers l’essentiel, que chaque amateur de rock 60’s anglosaxon un peu sérieux connait normalement. La plupart des titres plus rares ou étonnants étant rassemblés, cela est assez logique finalement, vu le voyage procrastinatoire que l'auteur s'autorise, dans les deux derniers chapitres. Par exemple : Time of Day des Remains, contenu sur leur unique album d'époque, Believe me, 10eme 45t des Guess Who, Samantha's'Mine, de The Spectrum, We Don't Know, de The Attack, I Am What I Want, de M.P.D. Ltd, Love's The Thing, de The Romancers, You Gotta Leave de The Gentlemen Wild...etc.) On passe à cet endroit à des notices un chouilla plus longues et des groupes bien moins grand public. Une grosse vingtaine de titres environ, repartis au gré des souvenirs et des "raccords" entre morceaux.
C’est donc assez simplement mais avec passion, c’est indéniable, que Serge Morinais déroule son "catalogue mémoriel" autour de ses pépites, avec à chaque fois l’interprète, le compositeur, la date de sortie de cités, puis de cinq à vingt phrases pour chaque notice, selon les anecdotes qu’il a à apporter, mais celles-ci ne sont malheureusement pas nombreuses, l’auteur se contentant de faits, de places dans les charts, d’une rapide remise en perceptive…C’est assez frustrant.
Alors, on prend certes un certain plaisir à feuilleter cette énumération de titres, qui ont tous été joué à un moment ou à un autre sur les Teppaz d’adolescents ou à la radio à l’époque, (quoi que pour les plus rares, il fallait surement s'accrocher en France), certains finissant même par être interpétés par des guitaristes amateurs français, créant des groupes de reprises rien que pour s’éclater le weekend et pouvoir peut-être mieux emballer les demoiselles*. L'amateur pourra même y trouver un certain intérêt, avec les titres les plus obscures donnant envie d'aller les dénicher et écouter, mais tout cela aurait peut-être cependant mérité d’être rassemblé dans un ordre différent (l’auteur explique en effet que ceux-ci ont été "simplement déclinées au gré de mon inspiration"), d’autant plus que si Index il y a en fin de volume, aucun report de page en face n’existe, pouvant renvoyer à la notice souhaitée. Idem en ce qui concerne les groupes : une erreur impardonnable. Et ce n’est malheureusement pas le seul défaut de ce livre, qui en dehors du fait de ne pas apporter d'avis très critiques ou d'anecdotes, apparaît davantage comme une compilation de titres du Billboard et des tops de mags spécialisés européens, (d’où leur classement souvent cité) - informations que tous les amateurs auront pu trouver depuis bien longtemps dans la langue de Shakespeare. Alors certes, cela a le mérite d'être recensé et regroupé, mais on aurait aimé un style d’écriture plus enjoué, plus personnel. Ajouter le fait qu’il n’y ait pas d’illustration (on aurait pu apprécier la reproduction au minimum des pochettes de disque), et un ton très « fanzine, avec un défaut de relecture notable, tout cela donne au final l’impression que l’éditeur Camion blanc a laissé entière carte blanche à un amateur passionné sans y mettre le moindre grain de sel, pourtant son travail normalement. Le lecteur est en droit en effet d’attendre un peu plus d’un investissement d'une valeur de 30 euros. Au final, la question se pose : quel est le public visé ? Je ne saurais vous répondre. On privilégiera dés lors sans doute la version numérique, vendue moitié prix.
FG
(*) C’est justement ce qu’à fait Serge Morinais, qui en 1966, avait monté avec d’autres copains le Sneakers group, qui n’a malheureusement jamais enregistré. Il faut croire que toutes ces musiques qui l’ont suivi depuis, et auront marqué sa vie, lui on donné envie de les rassembler dans un même et unique écrin.
British beat, American Beat, Freakbeat & Garage Rock 60’s. 350 pépites...
de « A Hard Day’s Night » à « Zoot Suit » ... en passant par « Satisfaction »
Par Serge Morinais.
Éditions Camion blanc, avril 2021 (30€) - ISBN physique : 9782378482534
ISBN numérique : 9782378482541