beckettés
dans un miel d’ozone
mille passereaux répètent
chutes et rebonds
mes yeux freinent
les pensers durs qui me dévorent
*
soirs fragiles
si près de toi, mer
tu me tenais dans ta main
ta main tiède et courbe
quand j’allais
au large et revenir, ou pas
*
diabolo
anis sur la table
repos au café de Conques
après les 17
kilomètres
d’une marche dans la garrigue
*
peu à peu
ces signes terniront
sur le papier, dans ta tête
bribes qui voudraient
préserver
quoi ? nous ? en si rares syllabes ?
*
pique l’aube,
découragée l’herbe
des milles étoiles s’éteint
la pensée retourne
à sa page
angoisseuse, brouillaga, pleutre
*
pourras-tu
loin de moi longtemps
accueillir l’expérience
de léger nuage
gustatif
rue de Grenelle, de Bretagne ?
*
le glu wein
en gare de l’Est
nous l’avons pris en partant
ou bien au retour
je ne sais
en quelle année ça se passa
*
le passé
kaléidoscope
je le secoue pour trouver
configurations
adéquates
à nos souvenirs en commun
Jacques Roubaud, Chutes, rebonds et autres poèmes simples, Gallimard, 2021, 104 p., 12€, pp. 7, 9, 15, 34, 37, 55, 76, 90. En librairie le 4 novembre. Site de l’éditeur.