Catherine Lane – Maria

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

Toute désarticulée comme une figurine
 
pour étude de médecine
descendue de l’avion
les pieds dans le sable noir
il fait nuit
seules les étoiles connaissent mon nom
 
Carlos pourtant est au rendez-vous
ce grand Aztèque me reconnaît
dans ma longue robe de coton rêche
brodée de fleurs bleus
 
Il me dit
tu ressembles aux femmes de mon pays
là-haut dans les montagnes
au-dessus des nuages
 
Il me croit enceinte
en fait je dissimule ma bonne fortune
sous ma robe
 
J’accouche en confiance
 
Dans la profondeur de la nuit
nous gravissons les flancs
de sa Montagne
la « Montagne des Seigneurs »
il me guide sur cette terre
où aucun Blanc n’est désormais invité
aventuriers ou journalistes
hippies en quête de Nirvana
voyageurs aux verbes étranges
profanes 
 
Maria assise près de son brasero
se lève à l’arrivée de son fils
depuis le passage des blancs
elle a oublié certains repaires
Carlos lui rappelle « les Petits qui poussent »
les plantes sacrées dont elle lui masse
la saignée du bras gauche
j’assiste  au « baiser de la guérison »
 
c’est ainsi que je le nomme
 
Dans cette jungle où l’alchimie solaire
 
déclenche les pluies d’améthystes
 j’entre dans l’arbre
 
écartant ses racines de feu
 
Du feu de la Terre je monte
 
en un vertige circonvolutionnaire
 
dans « la nuit du cœur »
 
Une transe sans tambour
où le Silence si nommé
frissonne
« les enfants sacrés parlent »
 
Indéfiniment Carlos alimente
le feu de la Terre
inspiré par Maria
 
Au bout de ma nuit
un mur où les plantes sacrées grimpent
dans la lumière du jour
le mur de la guérison
où je pose mes mains
gardiennes de l’aube
Gracias Maria

***

Catherine Lane (née en 1954 à St-Hilaire, Québec)