La frontière n’est peut-être qu’une ligne mais elle sépare, bloque, sauve, unit, et change. Le travail de Nathalie Déposé pour le cinéma (Alain Resnay, les frères Larrieu et d’autres) consiste à faire des repérages pour les images à venir. Dans son activité personnelle de photographe, elle crée des histoires, cherche des filiations, explore son propre rapport avec le passé, notamment le passé de sa famille. C’est ainsi qu’elle retourne sur les lieux où son grand-père a franchi la frontière entre Espagne et France à l’âge de 10 ans, lieux qu’il a lui-même photographiés, région où il s’est marié. Ce récit de la frontière franchie, elle a voulu y confronter les images d’aujourd’hui, comme pour voir s’y révéler l’histoire et le passage du temps. Elle montre des photos prises par son grand-père et d’autres, aux mêmes endroits, qu’elle a prises plusieurs années plus tard, après la mort de son aïeul. Sur ces images, elle trace des traits, ceux de la frontière et de la montagne comme lignes de ses mains, marquant les empreintes transmises, d’autres étirant les arbres jusqu’au ciel, d’autres encore comme détricotant le paysage pour en montrer le franchissement. Elle tire le fil d’une histoire familiale — qui résonne avec tant d’autres d’hier et d’aujourd’hui, de génération en génération — pour qu’on n’oublie pas qu’un enfant de 10 ans a été capable de franchir seul la montagne et une frontière pour fuir la misère et créer sa propre vie.
Ces photos sont visibles à la Galerie Hors-Champs, à Paris, jusqu'au dimanche 21 novembre 2021
dans le cadre de l'exposition "Se souvenir d'un autre espace"