Feux de sauge, de Françoise Matthey

Publié le 13 octobre 2021 par Francisrichard @francisrichard

Légère, au plus aigu de mon enchantement, j'abandonnais mes feux de sauge et mes prières, me rendais.

La montée vers la cascade du Dard permet à Françoise Matthey non seulement de renouer avec un souvenir d'enfant, mais de retrouver dans l'air pur une lumière à nulle autre pareille.

Il n'est dès lors plus besoin de faire des Feux de sauge pour rendre l'air pur puisqu'il se trouve en ce lieu, ni de faire des prières pour que se fasse entendre le chant immémorial du monde.

Sa madeleine, ce sont des boutons qu'elle redécouvre dans leur boîte en cherchant pour Guillaume un carton qu'elle sait trouver dans la grange de la ferme franc-montagnarde où elle vit.

En fait, dès l'entrée de la grange, ses souvenirs sont revenus, avec l'odeur du foin, et elle refait ici le trajet tant de fois accompli du Moulin - au nord de l'Alsace où elle est née - à la Suisse.

Avec le confinement, insistante la voix de la mémoire lui parle, mais ses souvenirs sont beaucoup plus que des souvenirs, ils sont des réponses à cette longue question qui les contient:

Nos souvenirs accueillis dans un ballet salutaire - relativisés par le temps, nos trajectoires, nos rencontres prégnantes - ne participent-ils pas au mystérieux mouvement d'espérance appliqué à vivifier une énergie parfois occultée et cependant appliquée à rassembler l'épars, la fragmentation de notre être en ces temps déconcertants, à restaurer l'unité de notre vécu et de notre présence au monde vers une réalité en devenir?

Cette question éclaire le lecteur de ce récit où les expériences singulières propres à une génération tendent ici à l'universel parce qu'elles reflètent notre humanité et toute la poésie du monde.

Francis Richard

Feux de sauge, Françoise Matthey, 168 pages, Éditions de l'Aire

Livres précédents:

À la croisée des brides (2016)

Dans la lumière oblique (2019)