La télé réalité américaine a donné lieu à un show particulièrement intéressant. Matt Damon et Ben Affleck ont en effet décidé de produire Project Greenlight, une émission où plusieurs aspirants réalisateurs se battent pour pouvoir tourner leur film budgété à quelques millions de dollars. John Gulager, candidat de la troisième saison, a ainsi pu réaliser Feast, film gore et fun se passant dans un bar. La télé réalité peut elle donc parfois produire de bonnes choses ? Réponse juste en dessous.
Feast – Les créatures de l’enfer attaquent
Un bar au fin fond du Texas. Tout le monde vaque à ses occupations, quand soudain un homme fait irruption dans la pièce principale, du sang sur le visage et un fusil à la main. D’après lui, des créatures mutantes et affamées vont arriver, il faut se barricader et se préparer à les repousser. La nuit ne fait que commencer…
Par son rythme et sa mise en scène, Feast fait immédiatement penser à des classiques du gore amusant comme Evil Dead ou Brain Dead. Le script s’amuse en effet à tordre le cou à tous les clichés un par un. On peut citer en exemple la scène d’intro qui présente les protagonistes un à un, avec un petit freeze, le temps de donner leur nom, leurs passions et leur activité principale. On a ainsi le droit à un « The Hero, occupation : kicking ass » pour l’homme qui fait irruption dans la pièce. Comme il se fait décapiter environ 30 secondes plus tard, un deuxième personnage de héros nous est présenté avec le titre « This time, the right Hero, occupation : survive longer than the first hero ». (Désolé pour les non anglophones…)
Et tout le film est à l’image de cette première scène. Les monstres sont particulièrement crétins et moches, attaquent n’importe comment, s’amusent à forniquer quand ils perdent l’un des leurs, vomissent pendant des heures sur l’un des réfugiés… Bref c’est de parfait mauvais goût, et c’est franchement réjouissant. Il y a du vomi, beaucoup de sang, des morts bien graphiques, des maquillages bien cracra, des liquides suintant et visqueux. Bref, de ce côté-là, le cahier des charges est bien rempli.
Un des gros défauts que l’on peut reconnaître aux petits films est de souvent se contenter d’essayer d’animer un script quelconque. Le résultat est donc souvent médiocre. En choisissant la voie de la gaudriole, de la boutade et du coussin péteur, alors que le résultat pourrait paraître casse-gueule, Feast arrive à surpasser son statut de « petit film » pour devenir un film vachement sympa qu’il est bien même que wesh. Et franchement, vu comme le projet avait démarré, c’était tout sauf gagné.
Lorsqu’on sait que le réalisateur choisi pour le film a une personnalité plutôt refermée, qu’il a passé son temps à s’accrocher avec la production, que le courant ne passait absolument pas avec son casting, que le tournage a été constamment sous tension… on se dit que le résultat tient presque du miracle. On peut faire facilement un parallèle avec d’autres tournages un peu maudits qui ont fini par accoucher d’œuvres rageuses et réjouissantes.
Car la rage, Feast en déborde. Ses personnages sont cons et iront jusqu’au bout de leur lâcheté pour survivre. Ils se tuent par accident, camouflent leurs crimes, se menacent les uns les autres, fuient en laissant les vieux ou les handicapés derrière eux, laissent les enfants se faire massacrer… bref ils sont humains, et leur humanité va les conduire à faire les pires erreurs. Alors certes on reste à des années lumières de la finesse psychologique de n’importe quel film plus « traditionnel », mais la base est là, et elle marche plutôt bien.
Feast est donc un film étonnant, car particulièrement réussi pour sa catégorie. C’est, à l’instar de ses modèles Evil Dead ou Brain Dead, un pur film de potes à se regarder un samedi soir avec une bonne grosse pizza ou des spaghettis bolognaises, histoire de se fendre la poire et passer un bon moment. Pas mal pour un film créé par la télé réalité, non ?