L’âme qui se retrouve brisée est celle du violon de Yu Mizusawa, à Tokyo, en 1938. Ce dernier avait osé jouer une œuvre de Schubert en compagnie de trois étudiants chinois restés au Japon malgré les prémices de la guerre sino-japonaise. En entendant le bruit des bottes des militaires entrant dans le centre culturel municipal de Tokyo, Yu a le réflexe de cacher son fils Rei, âgé de 11 ans, dans une armoire. Par le trou de la serrure, le gamin voit les soldats fracasser le violon de son père et embarquer le quatuor. Quelques instants plus tard, le lieutenant Kurokami, grand mélomane, découvre la cachette de l’enfant, mais ne trahit pas sa présence et lui confie même les débris de l’instrument de son père…
« L’âme brisée » est l’histoire d’une reconstruction. Celle d’un gamin qui mettra toute sa vie à comprendre les aboutissants de cet évènement tragique qui le sépara à jamais de son père, mais également celle d’un luthier qui vouera toute sa vie à la restauration d’un violon pourtant jugé irrécupérable. Un roman sur le déracinement, sur les origines et sur la musique qui traverse les époques et véhicule les émotions au-delà des guerres…
Si l’auteur nippon, tombé amoureux de la langue française au point d’écrire celui-ci directement en français, livre un roman classique au style simple et dépouillé, il ne délaisse pas pour autant ses origines et baigne son œuvre dans la poésie et la délicatesse de la culture japonaise. Malgré le déchirement provoqué par la scène initiale et la noirceur qui entoure toute guerre, Akira Mizubayashi demeure positif tout au long du récit et ne s’attarde pas trop sur les fausses notes de l’humanité…
Âme brisée, Akira Mizubayashi, Gallimard, 244 p., 19 €
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