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Une belle mort

Publié le 01 août 2008 par Chondre

Le sujet ne se prête certainement pas à la légèreté estivale. Qu’importe. Tout le monde ne se rafraichit pas au bord d’une piscine ou d’une plage, les doigts de pied en éventail. Il reste une quantité certaine de crétins à Paris, crétins qui travaillent dans des bureaux en plein soleil, sans climatisation et ou le mercure frôle régulièrement les trente-cinq degrés Celsius au beau milieu de l’après-midi. Un comble lorsqu’on a pour mission de mettre au point un plan canicule qui tienne la route.

Le frère et la belle sœur de Snooze ont passé la journée de dimanche dernier en notre compagnie. Julien semblait contrarié. Sa grand-mère était hospitalisée depuis quelques semaines. Insuffisante rénale chronique, sous dialyse, presque aveugle, elle ne pouvait décemment plus rester seule dans son appartement parisien. Lorsque Snooze a tenté de réunir nos deux familles en décembre, j’avais eu un choc en la revoyant. Elle était diminuée, fatiguée, presque l’ombre du titi parisien que je connaissais. Ma grand-mère de 96 ans, dix ans de plus qu’elle, paraissait bien plus alerte et dynamique. J’ai compris ce jour là que j’avais beaucoup de chance d’avoir une aïeule aussi alerte et indépendante à l’aube de ses cent printemps. Car ma vision de la vieillesse était biaisée. Ma grand-mère n’a que très peu fréquenté les hôpitaux et taquiné la maladie, vit seule en Corrèze, voyage sans accompagnateur et s’occupe de son jardin comme une grande. Même si diminution physique il y a, elle semble supportable.

Je ne me suis jamais mêlé des affaires de la famille Snooze. Nous en avons parfois discuté en compagnie d’Absinthe, ma belle-sœur. Leur grand-mère semble avoir brûlé la chandelle par les deux bouts et s’être transformée en mini Tati Danielle. Pour résumer brièvement la situation, la famille a sévèrement dégusté des agissements de cette grand-mère Rock n’Roll. La plupart de ses descendants a ainsi profondément souffert de son comportement et semble dorénavant se braquer. Personne ne peut ni ne souhaite l’accueillir au sein de son foyer et la recherche d’une place en maison de retraite est plus que jamais à l’ordre du jour. Un tel placement se révèle cependant être problématique. Moralement, car leur grand-mère passera du statut d’individu plus ou moins indépendant à celui de personne assistée résidant dans une sorte d’antichambre de la mort. Financièrement également, la moindre chambre parisienne coutant l’équivalent du salaire d’un cadre supérieur ou d’un rein (sans jeu de mots).

Cerise sur le gâteau, elle commence à oublier et confondre individus, choses et situations. Hospitalisée transitoirement, la famille devra rapidement faire face à ses responsabilités et décider du sort qui sera réservé à cette grand-mère bien encombrante et en fin de parcours. Pas facile de trouver le juste équilibre entre son propre confort moral ou matériel, et le choix du meilleur placement médicalisé possible. Snooze est froid. Il méprise sa grand-mère, source pour lui de toutes les tensions familiales. Alors qu’il ne cesse de juger mon comportement vis-à-vis de mon père, il n’agit pas différemment avec elle. Moi qui passe mon temps à taquiner Snooze en lui disant qu’il me retrouvera un jour tout froid à côté de lui après avoir claqué en plein sommeil, c’est finalement tout ce que je me souhaite. Un peu moins pour lui car seuls les survivants trinquent.

C’est bon l’égoïsme.

:king_tb:


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