Sagesses et philosophie appartiennent à des orientations de pensée strictement différentes. Même si certains philosophes s’en réclament, il s’agit d’une vision erronée de la sagesse. Certains philosophes sont persuadés que la sagesse n’est autre qu’une formulation de vérités supposées absolues. En ce sens, ils se trompent, la sagesse n’énonce aucune vérité absolue. C’est fondamentalement différent.
LA PHILOSOPHIE prend appui, et a pour base un système préexistant défini depuis le départ. Ce système peut être un pays, une communauté, un continent, une croyance religieuse ou non. En fait, tout ce qui fait que des hommes soient unis par un idéal ou une pensée commune qui s’impose à eux.
La philosophie dans ces conditions a pour tâche de faciliter l’intégration des humains dans ce système crée par l’homme lui-même, faut-il le rappeler.
Dans tous les cas de figures, et parfois de façon permanente, le système sociopolitique, socioreligieux ou non, est perçu comme sacré, immuable. L’homme doit s’y soumettre.
Ainsi, Jean-Jacques Rousseau propose un contrat social pour que les gens sortent de l’état de nature, en contrepartie de la perte d’une part de leur liberté, pour un état civil. Dans ce contrat civil, les citoyens gagnent la stabilité dans une communauté protecteur.
Rousseau indique d’une manière, on ne peut plus claire, que l’individu doit se soumettre aux lois conçues par tous. On trouve encore l’idée d’obéissance et de soumission dans la philosophie d’Emmanuel Kant. Philosophe qui, faut-il le rappeler, a été largement influencé par Jean-Jacques Rousseau.
L’idée de soumission et d’obéissance à ce que l’homme crée lui-même trouve son expression la plus éloquente dans la notion de République et celle de Démocratie. L’homme en tant qu’être vivant s’efface devant la république pour n’en devenir qu’une entité abstraite. C’est là, une forme subtile de l’aliénation humaine.
L’idée même de la vie bonne, si chère aux philosophes, s’inscrit, et ce depuis l’Antiquité, dans cette pensée. En effet, la vie bonne consiste à trouver son bonheur dans une cité qui n’est pas toujours bienveillante. L’idée capitale est que la cité est tellement écrasante qu’il est difficile de la changer. Aussi ne peut-on que l’accepter, s’y soumettre et trouver des astuces pour y survivre.
Paradoxalement, la philosophie prépare l’homme à la soumission sans réserve. Elle le prépare à l’idée de nation suprême, de mourir pour elle. Elle le prépare également à accepter, sans broncher, les dictatures de la pensée. À bien d’autres formes de dictature. Enfin de compte, la philosophie dans une certaine mesure, par l’obéissance et la soumission, prépare à la guerre.
LA SAGESSE, elle, s’inscrit dans une autre orientation de pensée. La sagesse telle que connue chez Lao Tseu et chez le Bouddha a pour préoccupation essentielle l’humain qui est l’élément de départ, l’élément essentiel et primordial. L’humain doit posséder les éléments nécessaires pour construire lui-même sa propre cité, son propre empire. L’idée même de cité et d’empire diffère de façon fondamentale de son acception dans le monde de la philosophie.
Lao Tseu introduit l’idée du Tao qui est tout sauf un empire. J’ai défini le Tao dans des articles précédents comme étant la conscience suprême ; quelque chose au-dessus de tous les humains ; mais quelque chose à laquelle on ne doit jamais se soumettre aveuglement, puisque le Tao lui-même n’est pas tyrannique.
La notion fondamentale du Tao qui ne contraint pas est exprimée à maintes reprises dans le livre de Lao Tseu, Tao Te King, le livre de la voie et de la vertu.
La philosophie de Lao Tseu est avant tout basée sur la préparation de l’homme à l’ultime sagesse. Cette sagesse elle-même est fondée sur un grand principe qui est le non-agir. Je vous invite à regarder la vidéo que j’ai consacrée à ce thème et de consulter également ma playlist consacrée à Lao Tseu :
Dans l’idée du Non-Agir on constate déjà que c’est à l’homme lui-même que revient l’action ou la non-action.
On trouve la même sagesse chez le Bouddha. Cet homme sage ne propose nullement un système taillé sur mesure auquel on doit impérieusement s’adapter. La pensée du Bouddha, comme du reste celle de Lao Tseu, contrairement à ce que l’on pourrait croire en occident, s’inscrit avant tout dans une dynamique. Elle ne s’inscrit jamais dans la résignation et la stagnation.
Le Bouddha ne considère, ni la maladie, ni la misère, ni la mort comme une fatalité. Ce sont des choses auxquelles on pourrait trouver des réponses. Le détachement par rapport à la maladie, la vieillesse, la misère, paradoxalement est considéré par le monde occidental comme une sorte de soumission à la fatalité. Un examen, un tant soit peu attentif de la sagesse du Bouddha, prouve le contraire. Se détacher de la fatalité est déjà une détermination en soi. À partir de cette dynamique de, base, il appartient à l’humain de construire par lui-même le mode de pensée qui lui permettrait, en fonction des évolutions scientifiques, sociales, humaines, de trouver les réponses adéquates à ce que le Bouddha considère comme des maux.
Un texte fondateur de la pensée du Bouddha mérite toute notre attention. Cette citation est l’exemple même de la pensée libératrice du poids des traditions, et des fatalités :
« Ne croyez pas ce que vous avez entendu. Ne croyez pas les traditions, car elles sont passées entre les mains de plusieurs générations. Ne croyez pas ce qu’on répète sans cesse. Ne croyez pas simplement parce qu’il s’agit des écrits de quelques vieux sages. Ne croyez pas aux conjectures. Ne croyez pas à l’autorité, aux maîtres ou aux anciens, mais après une observation et une analyse attentive, si cela correspond à la raison et profite à tout un chacun, acceptez-le et vivez votre vie en conséquence. »
Ce texte est suffisamment clair et suffisamment explicite pour se passer de tout commentaire.
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