Après des décennies de documentaires sur la nature, Luc Marescot se frotte à la fiction et s'enfonce dans la jungle cinématographique avec le délicieux Poumon Vert et Tapis Rouge.
Quoi de mieux pour sensibiliser le grand public à la sauvegarde écologique qu'une fiction engagée avec un casting de stars américaines ? La réponse n'est autre que le merveilleux Poumon vert et tapis rouge, un documentaire sur le parcours du combattant mené par un amoureux des forêts équatoriales, Luc Marescot, bien décidé à faire bouger les choses avec sa caméra, quitte à s'aventurer dans la plus terrible et infranchissable des jungles, Hollywood.
Auteur de plus de 80 documentaires sur la nature, réalisateur et chef opérateur pour l'émission Ushuaia de Nicolas Hulot durant 22 ans, lauréat de nombreux prix internationaux pour ses films, Luc Marescot décide cette fois de changer de style, de genre et de format. En se liant d'amitié avec le botaniste Francis Hallé, il se met en tête d'écrire et de réaliser tout seul une fiction, un blockbuster américanisé, un thriller écologique avec Leonardo DiCaprio. Mais les portes du septième art s'ouvriront-elles pour le documentariste ? C'est ce qu'explore avec une grâce incroyable Poumon vert et tapis rouge.
Essentiel
Pourtant, comme le laisse entendre le projet lui-même, Poumon vert et tapis rouge se veut unique dans sa forme et dans son fond. Le résultat final ne sera ni une fiction, ni un documentaire, ni les deux, le long-métrage est un ovni. Un cri du cœur, une œuvre nécessaire où seule compte la volonté irrépressible de son auteur de galvaniser l'impact que ses réalisations peuvent avoir sur les spectateurs, plus sensibles à un film d'action comme Blood Diamond qu'à Frères des Arbres, pourtant lauréat de la catégorie Global Voices aux Nations Unies. Il va donc falloir se retrousser les manches !
Extrêmement didactique, Poumon vert et tapis rouge s'apparenterait plus à un making-off particulièrement dense, tout en étant d'une lisibilité folle sur l'envers du décor cinématographique. De l'idée originale et originelle à la pré-production, de l'écriture du script à la conception du storyboard, des démarches pour trouver un producteur lors de repérages à Cannes ou à Hollywood, tout est imagé, commenté, analysé. Un parfait manuel pour tout apprenti cinéaste qui voudrait se lancer dans une pareille aventure, qu'on qualifierait presque de masochiste après visionnage de cette œuvre passionnante.
Un chemin de croix pour Luc Marescot, pourtant loin d'être un étranger de ce milieu artistique. Cependant, comme il le montrera lors d'échanges captivants avec des professionnels du cinéma, de Claude Lelouch à Juliette Binoche en passant par Edouard Baer ou les " copains " du monde du documentaire comme il se plait à les appeler, de Nicolas Hulot à Jacques Perrin ou Antoine de Maximy, tous sont unanimes ; il faut déjà avoir fait ses preuves avant de se lancer dans un tel projet. Il faut un producteur. Il faut des investisseurs. Il faut avoir un gros nom au casting. Des contraintes qui s'accumulent malgré les conseils bienveillants de tous les intervenants, d'un côté comme de l'autre de l'Atlantique.
Poumon vert et tapis rouge pose ainsi un regard acéré, mais déclamé avec une touchante et communicative énergie pleine d'espoir, sur la tentative de s'immiscer dans ce monde très sélect sans que jamais le discours responsable ne soit oublié. En documentant son parcours d'images prises caméra à l'épaule, c'est surtout lors d'un montage de remplacement que la symbolique de son combat prend toute son ampleur. Avec des maquettes pour imager les différentes étapes de production, du motion design ou l'animation de storyboards, des inserts astucieusement intégrés à son téléphone portable, c'est bien évidemment sur l'alternance entre images de déforestation qui contrastent avec celles de la canopée immaculée et majestueuse que repose la force du métrage.
Fort de ses nombreuses réalisations pour la sauvegarde de la nature, Luc Marescot nous offre avec Poumon vert et tapis rouge une oeuvre entre le vlog, la fiction, le making-of et le documentaire, une plongée intimiste dans le monde du cinéma et les dernières forêts tropicales. A ne surtout pas manquer, en attendant la suite.