Cameroun – Paul Tasong : « 2019 a été l’année la plus catastrophique pour la crise »

Publié le 20 septembre 2021 par Tonton @supprimez

Le coordonnateur national du Plan présidentiel de reconstruction et de développement des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest fait le bilan de la première année de mise en œuvre de cette initiative qui vise le relèvement des activités dans ces régions touchées par la crise.

Que peut-on retenir des travaux de la 3ème session du Comité de pilotage du Plan présidentiel de reconstruction et de développement des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest?

La 3ème réunion du Comité de pilotage du Plan présidentiel de reconstruction et de développement des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest tenue ce 16 septembre 2021 aux services du premier ministre avait pour objectif de rendre compte de l'état d'exécution pour ce qui de l'année 2020-2021,proposer et d'obtenir l'approbation du Comité de pilotage du plan de travail annuel 2021-2022 ainsi que les ressources financières appropriées et présenter un rapport d'une étude réalisée par la coordination nationale sur l'évolution et les impacts socio-économiques de la crise.

A ce jour quel est le taux de réalisation de ce plan malgré la persistance de la crise socio-politique dans ces deux régions ?

Je vais davantage mesurer le taux de réalisation par rapport à l'impact de la crise sur son évolution de 2017 à 2020. C'est cela le cœur de l'étude sur cette évolution dont j'ai fait allusion plus haut. Il faut noter que la crise s'est signalée en 2016, mais cette crise a battu son plein à partir de l'année 2017. Nous avons fait l'évolution des indicateurs socio-économiques dans les deux régions et bien entendu sur l'économie nationale et au terme de cette étude, nous avons fait un certain nombre de constats que nous souhaitons partager à l'opinion nationale. Sur le plan économique, nous nous sommes intéressés premièrement au bloc production. Nous avons prêté attention à la production agricole car ces deux régions regorgent un grand potentiel sur le plan agricole. Nous avons suivi l'évolution d'un certain nombre de spéculation dans les deux régions de 2017 à 2020 et nous avons fait des constats très importants.

L'évolution du cacao est restée à la baisse de 2016 à 2020. En 2016 la région du Sud-Ouest produisait 41% de la totalité de la production nationale du cacao. En 2020, nous avons enregistré une baisse de 26%. Nous avons constaté que cette baisse analysée à partir des chiffres enregistrés s'expliquait par le fait qu'une bonne partie du cacao dans le Sud-Ouest a été illégalement exportée vers le Nigeria. La deuxième spéculation qui retient notre attention c'est la banane d'exportation. En 2016, le Sud-Ouest a exporté 136 mille tonnes de banane et en 2019, cette région a exporté 16 mille tonnes de banane seulement, il faut préciser que les 16mille tonnes en question provenait du petit producteur car les grands producteurs n'ont pas exporté la banane pendant cette période. Dès 2020, la Cameroon development coorporation (Cdc), a repris sa production de banane dès 2020 et dès 2021, nous notons que la Cdc, a au 30 juin 2021 exporté 12 mille tonnes de banane. Ce chiffre est un indicateur prometteur dans ce secteur d'activité et c'est la même tendance dans le secteur de l'huile de palme ainsi que le caoutchouc, où la production a baissé dès 2019 avant d'enregistrer une remontée de la pente dès 2020. Nous pensons que ces tendances vont se consolider en 2021.

Les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ont comme partenaire international le Nigeria, il y a un flux commercial très important entre ces deux pays voisins. Nous avons constaté une baisse des activités commerciales entre les deux régions, une baisse qui s'est enfoncée jusqu'en 2019 et dès 2020 nous avons noté une reprise de la pente. La crise anglophone a ajouté des nouveaux objets du Commerce notamment une augmentation de la contrebande entre le Cameroun et le Nigeria notamment dans le secteur de la bière.

" Le taux d'exécution du budget d'investissement public est remonté à 90% "

Au niveau des finances publiques, nous avons constaté que les administrations fiscales à savoir les impôts et la douane avaient collecté 24 milliards FCFA de recettes fiscales en 2016 et en 2019 ces deux administrations n'ont collecté que 14 milliards FCFA et en les chiffres ont remonté à partir de l'année 2020. Au niveau des dépenses publiques, nous avons regardé l'exécution du budget d'investissement public dans les deux régions. Entre 2016 et 2019 il y a environ 750 projets d'investissement public qui n'ont pas été réalisés à cause de la crise et le taux d'exécution d'investissement public dans les deux régions a baissé pour se situer autour de 60% comparativement aux années antérieures, cette baisse a été assez importante en 2019 et depuis 2020 nous notons que le taux d'exécution du budget d'investissement public est remonté à 90%. Ceci nous amène à dire que les deux régions retrouvent leurs premières places dans l'exécution du budget d'investissement public.

Pour ce qui est de l'économie je dois dire que l'année 2019 a été l'année plus catastrophique pour la crise, tous les indicateurs sont partis à la baisse en 2019 et dès 2020 sont repartis à la hausse. Le seul secteur qui reste touché par la crise c'est le taux d'occupation des chambres d'hôtel qui reste encore très faible jusqu'en 2021. Sur le plan social, je vais m'attarder sur les secteurs de l'éducation. En 2016, il y avait un million cent mille élèves en classe dans le primaire et le secondaire. Cette situation est restée à la baisse jusqu'en 2019 où le taux d'inscription d'élèves dans le secondaire et le primaire est descendu à 225 mille et en 2020 nous étions à 427 mille élèves dans les classes au niveau du primaire et du secondaire au cours de l'année 2020-2021 dans les deux régions.

Dans le cadre de ce plan qu'est ce qui sera fait pour l'année 2022 ?

Nous allons continuer à mettre l'accent sur notre principal défi. Nous avons plusieurs défis comme la sécurité qui ne dépend pas de nous, notre travail c'est d'assurer le relèvement des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, notre travail c'est de permettre aux populations de reprendre leurs activités socio-économiques. Notre principal défi est de mobiliser les financements sur la mise en œuvre du plan. Ce plan a été conçu pour être financé par le gouvernement dans un premier temps et ses partenaires au développement. Nous avons engagé un certain nombre de discussion avec les partenaires au développement et nous continuons à poursuivre ces échanges avec l'espoir qu'avant la fin de l'année 2021 nous allons passer à la caisse avec ces partenaires. Mais je profite pour lancer un vibrant appel aux partenaires du développement de notre pays en disant que leur participation pour la mise en œuvre du plan présidentiel de reconstruction et de développement des deux régions c'est avec les participations financières mais le plus important aussi c'est pour ces partenaires c'est de donner un signant fort en condamnant les actes commis par ces personnes qui encouragent la séparation de notre pays. Le Plan présidentiel a été conçu pour redonner la dignité à nos compatriotes victimes des atrocités de la violence. Le plan de relèvement est une volonté du gouvernement à œuvrer pour la paix. Ce plan n'est pas une fin en soi mais une contribution à l'offre de la paix comme plusieurs autres offres mises en place par le chef de l'Etat.

Propos recueillis par Prince Nguimbous