Le port de l'écusson est rendu désormais facultatif pour les élèves musulmans. C'est la décision prise par Paul Atanga Nji après la réunion entre les responsables du collège, et les dignitaires de la communauté musulmane.
C'est au bout de 36 heures de négociation entre les responsables du collège confessionnel catholique de Mazenod et les dignitaires de la communauté musulmane à Ngaoundéré, que Paul Atanga Nji, le ministre de l'Administration territorial (Minat) a annoncé la suspension du port obligatoire de l'écusson du collège de Mazenod par les élèves musulmans de cet établissement. Les conciliabules qui ont commencé dimanche 12 septembre ont été closes mardi 14 septembre 2021. À l'entame de la rencontre tripartite du mardi 14 septembre 2021, le ministre a annoncé avoir trouvé un terrain d'entente avec d'une part les responsables du collège de Mazenod conduits à la rencontre par l'évêque du diocèse de Ngaoundéré, Mgr Abbo Emmanuel et d'autre part les représentants de la communauté musulmane avec en bonne place le lamido de Ngaoundéré, afin de préserver le vivre ensemble et la coexistence pacifique qui ont toujours prévalu dans la région de l'Adamaoua. Le ministre Atanga Nji résumera ainsi le consensus : " le port de l'écusson n'est pas obligatoire pour les élèves musulmans. C'est la principale solution qui se dégage de plus de 24h de concertation entre les différentes parties ". Pour le Minat, la tolérance et le vivre ensemble doivent être le leitmotiv des Camerounais de Ngaoundéré. Et Paul Atanga Nji d'insister sur la notion d'unité nationale. Dans la salle, les visages crispés des responsables du collège de Mazenod de Ngaoundéré et l'imam de la grande mosquée de Ngaoundéré en disent long sur cette annonce qui semble leur avoir été imposée par le ministre.
Avant de parvenir à cette décision, Paul Atanga Nji a rencontré le dimanche 12 septembre 2021, au collège de Mazenod, l'évêque du diocèse de Ngaoundéré. Après 90 minutes, il met fin à la rencontre. La position de l'évêque du diocèse de Ngaoundéré est ferme. " L'écusson fait partie de l'âme du collège de Mazenod et de l'identité des anciens ''Mazenodiens'' qui l'ont fièrement arboré ", explique-t-il à la presse. Puis, aux environs de 21 heures ce même dimanche, Paul Atanga Nji reçoit dans les services du gouverneur de l'Adamaoua l'imam Mahmoud Ali et ses partisans. D'un ton paternaliste, le ministre de l'Administration territoriale menace l'imam de la grande mosquée. La suspension du dignitaire musulman est évoquée par le Minat de façon allusive. " Le président Paul Biya nous a toujours appris qu'avant d'arriver à la sanction nous devons commencer par l'éducation, ensuite la sensibilisation, et puis la mise en garde.
Aujourd'hui, nous sommes venus vous sensibiliser. Quelle que soit la situation que vous avez en face de vous, sachez qu'il y a les représentants de l'État dans cette région. Vous devez tout faire pour trouver une solution et les écouter, car en tant que leader religieux, sachez qu'une décision que vous prenez a des conséquences sur l'ordre public et le vivre ensemble ", a-t-il martelé à l'endroit de l'imam de la grande mosquée de Ngaoundéré, qui est à l'origine selon le Minat de l'appel à la révolte. " Monsieur l'imam si vous avez quelque chose à dire à l'avenir vous vous adressez au lamido, qui par la suite va saisir le préfet ou le gouverneur. Ensemble, ils trouveront des solutions ", a insisté le membre du gouvernement. Il suspend la rencontre pour une reprise le mardi 14 septembre en matinée. Cette fois Paul Atanga Nji accorde sa matinée à l'évêque du diocèse de Ngaoundéré et au principal du collège de Mazenod. Après 2 heures de huis clos, rien ne filtre. Monseigneur Emmanuel Abbo ne cède pas. Aux environs de 14 heures, sans l'imam de la grande mosquée abandonné au hall de l'hôtel où loge le Minat, c'est le lamido Mohamadou Hayatou Issa qui est reçu avec ses collaborateurs. A 16 heures 45 minutes, le souverain sort l'air heureux. A la question du reporter de votre journal, il répond : " la fumée est très blanche " avant de s'installer pour une autre rencontre avec le ministre et l'évêque du diocèse de Ngaoundéré.
Prenant la parole, le lamido de Ngaoundéré joue la carte de la diplomatie. " Le terrain sur lequel est construit le collège du Mazenod a été cédé à Monseigneur Yves Plumey par mon oncle le lamido Mohamadou. Nous avons toujours eu des relations saines avec les responsables de l'église catholique. La preuve nous avons pris part il y a quelques jours au baptême par la mairie de la ville de la rue Yves Plumey. Nous vivons en parfaite harmonie ".
Pour sa part Monseigneur Emmanuel Abbo, l'évêque du diocèse de Ngaoundéré campe sur ses positions. " Je dois le dire clairement, il y a eu une fausse information qui a circulé dans les réseaux sociaux et les médias disant que le collège de Mazenod impose le port de la croix aux élèves musulmans. C'est faux ", explique le prélat. Et d'ajouter : " tous les élèves ont toujours porté fièrement cet écusson jusqu'à nos jours. Cette tenue et cet écusson sont portés depuis 1954 par tous les élèves à la création de ce collège. Il y a quelques jours nous avons célébré les 30 ans de l'assassinat de monseigneur Yves Plumey. Tous les anciens de Mazenod, musulmans comme chrétiens, arboraient avec orgueil et fierté, le logo de cet écusson sur les gilets, sur les tricots, sur les chapeaux, sur les casquettes. Donc à notre avis, cela n'a jamais posé un problème. Nous redisons que le collège de Mazenod a sa discipline, sa spécificité, et son identité. Tous les parents peuvent y inscrire leurs enfants. Mais tout parent qui décide d'y envoyer son enfant doit respecter cette identité et cette spécificité qui fait en sorte que nous puissions donner une éducation intégrale aux enfants qui viennent y solliciter une offre de formation ", insiste Emmanuel Abbo, l'évêque du diocèse de Ngaoundéré. " Quand nous rentrons au collège de Mazenod pour solliciter une offre d'éducation, nous devons savoir que cet établissement a une particularité et un esprit qu'aucune revendication, ni aucune décision ne doit remettre en cause ", a conclu Mgr Emmanuel Abbo, l'évêque du diocèse de Ngaoundéré.
Sous la contrainte de Paul Atanga Nji, le ministre de l'Administration territoriale, l'imam Mahmoud Ali de la grande mosquée de Ngaoundéré a signé un communiqué prenant à contre-pied une décision précédente. Dans le document partagé à la presse, l'imam Mahmoud Ali demande aux parents d'envoyer leurs enfants au collège de Mazenod. Instruction a été donnée par le Minat au gouverneur de la région de l'Adamaoua pour le suivi de sa décision. Une évaluation sera faite dans les prochains jours selon le membre du gouvernement. Concluant son propos, Paul Atanga Nji a mis en garde les dignitaires de la communauté musulmane de Ngaoundéré. " Nous espérons que l'affaire de l'écusson ne cache pas d'autres problèmes ", a-t-il conclu.
Une source proche du collège de Mazenod a confié au reporter du Jour que depuis le déclenchement de l'affaire dite des écussons du Mazenod, seulement sept enfants ont été retiré du collège par leurs parents.