La minuscule brigade cuisine un banquet dans un temps record, encore plus vite que les candidats de Top chef. Il est impossible d'y croire. On est dans un univers plus proche d'un conte fantastique de Jacques Demy comme Barbe-Bleue que dans un documentaire qui nous raconterait la naissance du premier restaurant.
Que ce soit une femme qui ait soufflé cette idée à un homme est une idée plaisante mais elle fait pas oublier que la cuisine est un univers extrêmement machiste où le lexique est emprunté à l'armée et où l'obéissance et la soumission font force de loi.
J'ai tout de même apprécié qu'on nous rappelle qu'avant la Révolution les pauvres se nourrissaient (dans le meilleur des cas parce que le pain était une denrée chère) alors que les riches se gavaient en exhibant des tables composées comme des tableaux. Les viandes étaient rehaussées de plumes, comme on pouvait encore en voir au début de notre siècle. L'oeil primait en quelque sorte sur le goût. Jusqu'à ce qu'on abandonne le service à la française (on présente tous les plats entiers en même temps) au profit du service à la russe (un plat après l'autre, avec service à l'assiette).
On n'a pas oublié le mal que s'est donné Parmentier pour faire admettre la pomme de terre, non pas parce qu'elle poussait sous terre mais parce que les premiers à les cultiver avaient eu la très mauvaise idée d'en consommer les feuilles. Elles sont très toxiques, de même que le vert des tubercules. Et il est exact que l'abondance d'épices servait autrefois à masquer le goût de la viande faisandée.
Mais en réalité, la naissance du premier restaurant ne s'est pas effectuée de façon aussi romantique. Ni bien entendu que ce soit un ancien relai de poste qui se soit transformé en auberge. Et rien ne dit que le premier patron ait été aussi imprégné des valeurs de la philosophie des lumières, notamment le droit à la seconde chance.Délicieux reste une charmante fable qui fait saliver à de nombreux moments, notamment à la vue de pâtes de fruits, et qui nous rappelle aussi que la vengeance est un plat qui se mange froid.Délicieux, un film d’Eric BesnardAvec Grégory Gadebois, Isabelle Carré, Benjamin Lavernhe, Guillaume de Tonquédec …En salle depuis le 8 septembre 2021