Finalement, il est assez difficile de résumer un livre qu’on a adoré ! « Retour en pays natal » de Nicolas Crousse est précisément indéfinissable, car il n’est ni une biographie, ni un roman, ni, ni… (Je reprends la citation dans le livre « Rien n’est vrai, tout est vivant » d’Edouard Glissant) Il est, en effet, bien plus que tout cela, il est unique et spécial.
Ce qui me frappe, en ce qui me concerne, c’est la quantité de choses partagées : des films, des chansons, des personnages. A quelques bonnes années de différence, nous avons tout de même côtoyé et souvent aimé les mêmes œuvres.
Ne pensons qu’à Alain Souchon que j’ai moi-même rencontré encore plus tôt, lors de son premier 45 toures « Amour 1830 » au festival de Spa et à qui j’ai fait connaître le terme de « taiseux », plutôt utilisé en Belgique, et qui le définissait un peu…
Bien sûr, j’ai aimé les recueils de poèmes de son père, Jean-Louis Crousse, et ce livre qui le concerne beaucoup me touche aussi pour ces relations si justement décrites.
Les souvenirs ! Comment ne pas être sensible à des phrases telles que : « Dans mon pays natal, il y avait des baisers trémulants, des parfums mystérieux, des nuits sans sommeil, des gestes à l’aveugle, des caresses à tâtons, des chuchotements clandestins. »
Ou à cette comparaison avec le cheval : « M’échapper de l’écurie. Partir à la venvole, sur un claquement de sabot, comme un voleur, présumé coupable mais libre… »
Il y a Michaux, Issa, Félix Leclerc, Chagall (dont le fils, David McNeil, parolier et un moment assistant de Deroll Adams, me consacre une page dans son livre « Quelques pas dans les pas d’un ange »)
Le style est magnifique ! Ces petits bouts de phrases qui font de la littérature impressionniste ! Et ces instants de bonheur de lecture comme ceci au début : « Ils s’écrivent de longues lettres, ponctuées d’envolées lyriques, de déclarations candides et de points virgules. »
Et sur l’état d’écrivain : « J’écris parce qu’on ne m’entend pas. Pour couvrir un peu le bruit. Parce que tantôt c’est trop, je m’égosille, je hurle, couine, beugle, gueule dans des bennes à ordures, je grime mon cœur en arme de boucherie, je rajoute de la laideur au désordre du monde… Et tantôt, c’est trop peu, c’est inaudible… »