Une affaire d'écusson avec l'insigne de la croix sur les tenues des élèves fait polémique. La sortie d'un communiqué de l'imam de la grande mosquée appelant au boycott du collège par la communauté musulmane lui a valu une convocation des autorités administratives. Ses partisans ont pris d'assaut la préfecture de la Vina.
Tout est parti d'un audio largement diffusé sur les réseaux sociaux dans la journée du 2 septembre 2021 appelant les parents d'élèves de ne plus envoyer leurs enfants au collège de Mazenod, le 6 septembre, jour de rentrée scolaire. L'auteur d'une voix grave et tremblante affirme que : " les responsables du collège de Mazenod impose le port de la croix aux élèves. Tout musulman doit éviter d'envoyer son enfant au collège de Mazenod. Ce message s'adresse à tous les musulmans de Ngaoundéré ", écoute-t-on dans l'audio de 2 minutes. Informé, le délégué départemental des Enseignements secondaires de la Vina saisit les responsables du collège de Mazenod pour en savoir plus clair. Information démentie immédiatement par le principal du collège de Mazenod. Le 6 septembre 2021, jour de la rentrée scolaire, tout se déroule sans anicroche au sein dudit établissement. Les apprenants sont présents et pour la grande majorité, ils portent l'écusson avec les emblèmes du collège de Mazenod. " L'écusson fait partie de la tenue scolaire. Sur l'écusson, il y a les emblèmes du collège de Mazenod. Notre position est celle que nous n'acceptons que les élèves qui respectent le règlement intérieur du collège ", explique le principal. Et d'ajouter : " nos élèves portent tous la tenue règlementaire. Et l'écusson avec les emblèmes du collège existe depuis la création de cet établissement d'enseignement privé catholique ".
Informé de la situation, le préfet de la Vina convoque une réunion entre les membres de la communauté musulmane conduite par Mahmoud Ali, l'imam de la grande mosquée et d'autres collaborateurs du lamido de Ngaoundéré. Nous sommes le mercredi 8 septembre 2021. La rencontre s'achève aux environs de 19 heures dans les services du gouverneur de la région de l'Adamaoua. " Nous avons écouté les deux parties. L'imam de la grande mosquée est dans son rôle et les responsables du collège de Mazenod dans leur droit. Nous allons attendre le retour de l'évêque de Ngaoundéré et une autre réunion sera organisée pour une résolution à l'amiable de cette affaire ", fait savoir Kildadi Taguiéké Boukar, le gouverneur de la région de l'Adamaoua.
Le lendemain jeudi 9 septembre 2021, Mahmoud Ali, l'imam de la grande mosquée de Ngaoundéré publie un communiqué. Il appelle les parents au boycott du collège de Mazenod, selon lui, l'établissement organise une sorte d'évangélisation en imposant le port de la croix aux élèves. " Il nous a été donné de constater, pour le déplorer, la décision prise par le collège de Mazenod rendant obligatoire à tous ses élèves le port du signe de la croix sur leur uniforme. Or, porter de la croix va à l'encontre des enseignements de notre religion, l'islam. Cela s'apparente à une méthode d'évangélisation savamment orchestré allant de la maternelle jusqu'au cycle secondaire dans leurs établissements confessionnels ", écrit Cheick Mahmoud Ali, l'imam de la grande mosquée de Ngaoundéré. Et de conclure son appel à l'endroit des autres imams de la ville de Ngaoundéré à rappeler aux parents de ne pas envoyer leur progéniture dans les collèges confessionnels qui imposent le port des signes autres que celui de l'Islam.
Le document est diffusé sur les réseaux sociaux et dans les foras suscitant une vague de polémiques. Des individus dans les foras demandent l'organisation d'une manifestation devant le collège de Mazenod. Les responsables et les enseignants du collège de Mazenod font l'objet des attaques verbales et certains leur promettent des agressions physiques. Dans la foulée, la situation prend de l'ampleur avec des échanges violents rangés entre partisans de l'imam et ceux qui soutiennent les responsables du collège de Mazenod.
Les autorités administratives ont convoqué l'imam de la grande mosquée pour une explication sur son communiqué le 9 septembre 2021. L'homme de Dieu dans la panique a alerté ses partisans de l'accompagner à la préfecture pour répondre à la convocation. Une foule nombreuse s'est déportée à l'esplanade de la préfecture de Ngaoundéré. Ils ont voulu en découdre avec le préfet. Selon eux, il a commis un crime de lèse-majesté en convoquant l'imam, Mahmoud Ali. Le lamido de Ngaoundéré et quelques élites se sont rendus à la préfecture pour désamorcer la révolte. Les partisans de l'Imam ont menacé d saccager le véhicule de l'autorité administrative. Certains badauds ont tenté d'accéder au secrétariat du préfet.
Une foule se déverse à l'esplanade de la préfecture de Ngaoundéré. Ils veulent en découdre avec le préfet de la Vina, qui selon eux a commis un crime de lèse-majesté en convoquant l'imam Mahmoud Ali. Mohamadou Hayatou Issa, le lamido de Ngaoundéré accompagné de quelques élites se rendent à la préfecture de Ngaoundéré pour désamorcer ce qui ressemble à une révolte contre le préfet de la Vina. Selon l'autorité administrative, l'attitude de l'imam de la grande mosquée est de nature à inciter à la révolte, et les troubles à l'ordre publique. Ce que nie l'imam de la grande mosquée de Ngaoundéré.
Dans la ville de Ngaoundéré, l'opinion semble divisée sur cette affaire d'écusson sur la tenue des élèves du collège de Mazenod. Certains trouvent l'attitude de l'imam de la grande mosquée déplacée. Cependant, ses partisans soutiennent que l'autorité religieuse est dans son devoir. Au moment où nous mettions sous presse cette information, le ministre de l'Administration territoriale, Atanga Nji, en visite de travail dans la région de l'Adamaoua depuis hier dimanche, était en réunion de crises avec les responsables du collège de Mazenod, les membres de la communauté musulmane et les autorités administratives, pour désamorcer la crise.