Avant de plonger dans le cœur du sujet, il est intéressant de noter que, dans une large mesure, ces domaines prioritaires ne comprennent pas de grandes évolutions mais sont, au contraire, principalement orientés vers la consolidation. Leur objectif est avant tout de résoudre les lacunes et les déficiences, identifiées ou émergentes, des expérimentations et des projets actuels. Plus généralement, on peut estimer qu'il s'agit dorénavant de passer d'une phase de découverte à une ère véritablement industrielle.
Ainsi, le premier (et plus important) enjeu pour une adoption généralisée est de développer une IA responsable. Et il y a urgence : ce n'est pas un hasard si les régulateurs de différents pays commencent à se pencher sur la question. Naturellement, certains secteurs, dont la finance, sont plus particulièrement concernés. Il leur faut donc rapidement s'atteler à intégrer systématiquement et sérieusement les notions de confiance, de transparence, d'auditabilité, d'équité et d'éthique dans les initiatives.
La tâche est ardue car les solutions spécialisées ne suffiront pas à couvrir tous les besoins. L'étendue même de ces derniers est difficile à cerner et les textes en cours d'élaboration n'en donneront pas toutes les clés, surtout quand sont envisagés les risques induits sur la relation avec les clients. En outre, les complexités techniques, dont les biais intrinsèques aux données en entrée, ne doivent pas être négligées. Pour Gartner, un élément de réponse passe par une formation adaptée de tous les professionnels.
Un deuxième défi critique à relever touche à la faible proportion de projets qui aboutissent en production (la moitié, en moyenne) et la durée de ces cycles de déploiement (environ 9 mois). Des outils d'automatisation et d'orchestration, des plates-formes de gestion opérationnelle des modèles… offrent une assistance en la matière, par exemple en facilitant la réutilisation, mais il subsiste également une barrière interne à abattre, due essentiellement à une gouvernance et des processus approximatifs.
Les deux derniers aspects de l'IA à appréhender relèvent de l'efficacité, d'une part dans l'utilisation des ressources, dont il faudrait maximiser le potentiel sur une vaste gamme de problématiques (via des approches composites ou génératives, entre autres), et, en parallèle, par la déclinaison des pratiques sur des « small & wide data » (jeux de données restreints et sources diversifiées, capables de produire des résultats plus riches et contextualisés) et non plus uniquement sur les « big data » habituelles.
L'intelligence artificielle est dans une situation paradoxale dans beaucoup d'entreprises : elle est déjà présente dans tous les recoins de l'organisation, elle s'immisce dans tous les processus, elle s'invite dans tous les métiers… mais sa mise en œuvre reste très artisanale. Cette montée en puissance, pour conserver sa dynamique et éviter qu'elle ne s'épuise par dispersion, doit être accompagnée par une démarche structurée et coordonnée, à grande échelle. Vue l'ampleur du chantier, il faut le lancer maintenant…