L’été s’est la pleine saison des moules, dont on peut se régaler en les cuisant à la marinière, comme je l’expliquais ici, ou en mouclade. Dans ce cas, on retire une de leurs coquilles après cuisson et on les sert à l’assiette, nappées d’une sauce à base de curry et de safran que les cuisiniers charentais ont appris à concocter à partir des épices que les négociants ramenaient de leurs expéditions maritimes à leur retour au port de La Rochelle.
Il existe une autre manière de les consommer, typiquement charentaise, en faisant une éclade, comme on dit sur le continent, ou une églade, comme on la nomme sur Oléron.
Les restaurants ont des espaces dédiés à ce type de cuisson qu’ils recommencent à utiliser car les confinements successifs ont drastiquement réduit ce qui est une véritable institution très pratiquée, à l’occasion de la moindre fête de village.Les particuliers se débrouillent avec les moyens du bord mais il faut respecter certains principes. Le premier est d'être loin des arbres, surtout les pins qui s'embraseraient facilement, même si, toujours, on aura à proximité un jet d'eau et une couverture (rien de mieux pour étouffer des flammes, et c'est un réflexe à avoir, même chez soi, et en particulier avec un appareil électrique sur lequel de l'eau serait catastrophique).Le nom vient du mot « éguiade » qui signifie en patois ancien « aiguillade » de par l’emploi des aiguilles de pin pour cuire les crustacés. La première chose est donc de ramasser des épines, les plus propres possible, surtout pas encombrées de terre ou de poussière. L’astuce est d’en débarrasser les mimosas qui poussent à l’ombre des pins en prélevant celles qui pendent à leurs rameaux. Ou de se baisser pour ramasser celles qui atterrissent sur la végétation qui couvre le sol. C’est long et fastidieux mais c’est le prix à payer. D’ailleurs la récolte est abondante et un sac est relativement vite plein.Il est également nécessaire de disposer de planchettes épaisses avec une sorte de rebord contre lequel on positionnera les moules, en les plaçant serrées côte à côte. On n’aura pas oublié de les nettoyer et de gratter le bossus. Et attention, il est indispensable que le bois ait auparavant trempé dans l'eau pendant plusieurs heures. Bref, une églade ne s’improvise pas. C’est tout un cérémonial.
On pourrait poser les planches par terre, les recouvrir d’épines et y mettre le feu. Il est plus prudent et plus commode de les poser sur la grille d’un barbecue dont on se servira comme support, sans charbon de bois évidemment.Il faut une certaine habitude pour doser l’épaisseur de la couche d’épines que l’on dispose sur la planche garnie de moules.Ensuite on y met le feu et on surveille en regroupant le combustible avec un râteau léger à manche longue car les flammes peuvent être très puissantes. Si on a bien estimée la quantité d’épines les moules sont cuites lorsque le feu s’éteint, faute de combustible. Il peut être prudent d’en goûter une en la prélevant en faisant attention à ne pas se brûler.Si on satisfait on prend le soufflet pour débarrasser au maximum la planche des aiguilles carbonisées.Après la cuisson, les coquilles des moules s'effritent sous les doigts et il ne faut pas craindre de se salir les mains. Surtout si on les mange avec des frites qui, elles aussi se dégustent avec les doigts. Les aiguilles de pin donnent un goût fumé aux moules que les puristes accompagnent se dégustent de pain et de beurre salé … Charentes-Poitou cela va de soi.A vous maintenant de vous lancer dans la réalisation de cette préparation typique de la cuisine charentaise, et particulièrement d’Oléron. Un autre jour je vous suggère les bulots, les huitres chaudes, et pourquoi pas des langoustines. Que du cuit maison bien sûr.