Chaque mois, dans ses 10 premiers jours, tout comme je le fais pour la littérature (dans ses 10 derniers) et tout comme je le fais pour la musique (vers le milieu) je vous parle de l'une de mes trois immenses passions: Le cinéma.
Je l'ai, dans l'ordre, consommé, étudié, y ai travaillé, ai choisi une autre famille, continue de la consommer avec gourmandise. Je suis sorti du cinéma mais pas l'inverse.
Je vous parle d'un film qui m'a séduit par sa cinématographie, son scénario, ses interprètes, son audace, sa réalisation, ses thèmes, ses sons, bref, souvent tout ça à la fois.
Je vous parle d'un film qui, bien souvent, est tiré de ma collection personnelle. Pas cette semaine. Cette semaine c'est une chanson de ABBA, une nouvelle chanson de ABBA, qui, à plus de 70 ans, m'ont quand même fait pleinement sourire entre 5 et 6 heures du matin. ABBA était au sommet de sa gloire en 1975. Ça m'a fait penser à l'année de naissance de ma petite soeur, Greenjelly Jones et de ma belle-soeur, Fanny Fingling. Je vous parle d'une comédie de 1975.
A DOG DAY AFTERNOON de SIDNEY LUMET
Le 22 août 1972, John Wojtowicz, Salvatore Naturile et Robert Westenberg tentent tous trois de cambrioler une branche de la Chase Bank de Brooklyn, située sur l'Avenue P à Gravesend, NY. On voulait mettre la main sur autour de 150 000$-200 000$, soit l'équivalent d'à peu près 1,2 million qu'ils avaient calculé qui seraient justement déposés ailleurs qu'à l'intérieur de la banque, autour de 15h00, pris en charge par un camion de sécurité prévu à cet effet. Selon Wojtowicz, c'est un directeur ou ancien directeur de cette banque, qui lui avait parlé de l'heure d'un tel dépôt, dans un bar gay que les deux fréquentaient, à Greenwich Village.
Le trio s'est pointé à 15h, mais le camion de dépôt était déjà passé, à 11h00, le même jour. Ils ont quand même mis la main sur autour de 29 000$ (l'équivalent de 175 000$ de nos jours) et ont tenté de s'échapper. Westenberg avait vu la police dans la rue et était parti dès le départ. La police s'est vite rendue sur les lieux, une prise d'otages a pris place. Wojtowicz et Naturile ont présenté une liste de demande qui se lisait comme suit: 1-Faire sortir Elizabeth Eden, son "épouse" de l'hôpital en échange d'un(e) otage. 2-ils voulaient du coca-cola et des burgers. 3-Un sauf-conduit jusqu'à l'aéroport, en limousine, où ils libéreraient les otages en toute sécurité et pourraient fuir en avion. Le siège a duré plus de 14 heures, on a fait 1 et 2, et lors du transport à l'aéroport, en limousine, Naturile, qui menaçait de tirer, a été tué et Wojtowicz a été arrêté.
Ce dernier a raconté au juge qu'un des objectifs du cambriolage était de trouver des fonds afin de payer le changement de sexe son partenaire amoureux, homme voulant devenir Femme. Un an auparavant, un prêtre avait accepté de célébrer une union (mais pas un mariage) entre Wojtowicz et son "épouse". Il a ensuite perdu son titre religieux.
Moins d'un mois plus tard, un article du magazine Life, racontait tout ça. On parlait entre autre que sur 14 heures, des liens d'amitié avaient été noués entre ravisseurs et otages. Certains de ces derniers ont comparé les criminels comme des pâles copies de Dustin Hoffman ou de Al Pacino. Ça a attiré l'attention d'un producteur. On a recueilli les témoignages des otages qui ont tous été rémunérés 3500$. Un seul a demandé davantage et a alors été exclu du script final. Wojtowicz a obtenu 7500$ (prêt de 44 000$ de nos jours) pour sa version de faits, et a donné 2500 à son épouse pour son changement de sexe. Cette dernière mourra du SIDA, remariée ailleurs, quelques années plus tard. La compagnie de film a payé pour les frais d'enterrement de Naturile et Westenberg, en prison deux ans, a refusé toute collaboration.
Frank Pierson, qui gagnera l'Oscar du meilleur scénario pour ce film, aura la mission de signer le script. À Noël 1973, le scénario est prêt. Peu de grandes vedettes hétérosexuelles avaient incarnés des gays sur grand écran, alors. Pacino a accepté deux fois le rôle avant de le refuser aussi les deux fois. La troisième il abandonne encore l'idée, voulant faire du théâtre. Il s'est finalement ravisé. Stressé et fort sur l'alcool. Ce qu'il a jugé qui aiderait son personnage. En effet, son personnage est formidablement énervé et instable. On voulait un acteur de 18 ans pour jouer Naturile, mais Pacino insiste pour qu'on choisisse son ami John Cazale. Lumet avait travaillé avec Al Pacino dans Scarecrow. Il savait ce qu'il pouvait tirer de lui. Sa performance est hystérique. Le film est d'abord appelé The Boys in the Bank.
La communauté Gay trouvera au final que la trame narrative entre Pacino et son amant était très sensible, humaine et touchante. De bon goût. Wojtowicz trouvera que seulement 30% ressemblait à lui, et à ce qui s'était passé, mais a beaucoup aimé le film quand il l'a finalement vu.
C'est une comédie très réussie qui pouvait facilement être mal gérée dans les années 70 peu ouvertes à l'homosexualité. Enfin, moins acceptée que de nos jours. Bien entendu, ce n'est pas parfait, c'est un traitement de son époque.
Mais c'est un divertissant 125 minutes.