Ce nouvel essai de la célèbre femme rabbin, Delphine Horvilleur, regroupe onze histoires qui découlent de son travail d’accompagnement des défunts et de leurs proches lors des obsèques de personnalités ou d’anonymes.
De l’enterrement d’Elsa Cayat, psychanalyste de Charlie Hebdo, assassinée en 2015, aux funérailles de Simone Veil et de son amie Marceline Loridan, surnommées les « filles de Birkenau », en passant par ce petit garçon qui demande où est passé son frère décédé ou cette New-Yorkaise dépressive qui passe son temps à organiser ses propres obsèques dans les moindres détails, Delphine Horvilleur côtoie régulièrement la mort, parfois même celles de personnes qui lui sont proche, comme sa meilleure amie. D’une prière récitée par téléphone à cause du Covid à cette cérémonie en tête-à-tête avec le fils de la défunte pour seul public, Delphine Horvilleur invite à réfléchir sur la mort, tout en rendant un hommage vibrant à la vie !
Cette réflexion sur la mort est en effet avant tout un roman sur la vie, qui n’empêche pas de régulièrement sourire et qui évite de donner le dernier mot à la mort, invitant à regarder au-delà, la où la vie continue… avec ses morts. Face à cette mort, l’auteure en profite également pour dévoiler une part d’elle-même, de cette grand-mère déportée dont personne ne parle à cet oncle inhumé au cimetière alsacien de Westhoffen, en passant par cette meilleure amie dont elle partage péniblement les derniers instants…
À travers ce texte, Delphine Horvilleur se révèle surtout une conteuse hors-pair qui puise dans les textes sacrés pour parler d’un sujet qui nous concerne tous au-delà des communautés religieuses. En s’appuyant sur l’étymologie des mots et la culture juive, elle exploite toute la puissance du verbe afin de vaincre la mort et de faire l’éloge de la vie.
Instructif pour ceux qui comme moi ne connaissent pas grand-chose au judaïsme, foncièrement drôle au détour de quelques blagues typiquement juives qui m’ont fait pouffer de rire, d’une finesse rare au niveau de la plume et inévitablement bouleversant et sensible vu le thème principal, « Vivre avec nos morts » est un superbe texte que je recommande à tous ceux qui, peu importe leur croyance, envisagent de mourir un jour, voire de vivre au-delà de la mort…
Vivre avec nos morts, Delphine Horvilleur, Grasset, 234 p., 19,50€
Ils en parlent également : Matatoune, Domi, Hélène, Jean, Jean-Pierre, Nadia, Adeline, Sandrion, Marie, Voyages au fil des pages
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