Constituée dès les années 60, la Collection Lambert représente les goûts du collectionneur, ses aspirations et ses passions : marchand depuis cette période, Yvon Lambert a combattu les académismes d’une peinture française qui refusait depuis la guerre de reconnaître que le centre mondial de la création n’était plus le Paris des années glorieuses, mais l’Amérique triomphante.
L’art minimal, l’art conceptuel, le land art représentent les piliers de la collection. Dans les années 80, le marchand-collectionneur s’est tourné vers une nouvelle peinture plus figurative, puis dans les années 90, la photographie a recueilli tous ses suffrages. Ensuite, la vidéo, les installations, la peinture ont constitué l’essentiel des achats qui permettent d’accroître le fonds toujours tourné vers la jeune création en devenir.
On trouve dans la collection des œuvres d’artistes aussi variés et renommés que Jean-Michel Basquiat, Miquel Barceló, Sol LeWitt, Robert Ryman, Lawrence Weiner, Nan Goldin, Andres Serrano, Christian Boltanski, Daniel Buren, Douglas Gordon, Anselm Kiefer, Cy Twombly, Niele Toroni, Bertand Lavier, Claire Fontaine, Miroslaw Balka, Adel Abdessemed ou Francesco Vezzoli, avec des ensembles souvent sans équivalent dans d’autres collections françaises.Une exposition composée d’une sélection régulièrement renouvelée d’œuvres du fonds est présentée en permanence dans l’Hôtel de Caumont, avec des focus consacrés à certains mouvements ou à certains artistes particulièrement bien représentés dans la collection, tandis que l’Hôtel de Montfaucon accueille les expositions temporaires selon deux cycles annuels.
Ses mondes singuliers se déploient à travers une multitude de médiums et de pratiques allant du dessin à l’installation et à la sculpture, en passant par l’animation, la photographie, la vidéo ou la production musicale. Ils sont peuplés d’antihéros maladroits, loufoques, faussement naïfs et parfois méchants, embarqués dans le chaos d’un monde absurde où toute activité humaine semble inexorablement vouée à l’échec.
La série de photographies qu’il a produites est née d’un projet de voyage visuel au cœur de l’Amérique contemporaine. Envisagé comme un anti-roadtrip traversant les États-Unis d’un océan à l’autre en ne suivant que des itinéraires empruntant les Interstates, il déploie une vision polymorphe nourrie par l’esthétique du documentaire, de la photographie conceptuelle ou de la lumière d’un cinéma américain d’avant-garde. Image après image apparaît, en surface, un système de références communes propres à l’imagerie américaine que l’artiste nous rappelle pour mieux le tenir à distance.
Dans un geste dont la singularité doit à l’ampleur de l’entreprise menée −deux ans de préparation à travers des sources littéraires, musicales, cinématographiques, sociologiques, philosophiques, puis un voyage de trois mois ininterrompu − Purple America nous tient en équilibre entre une relation éprouvante nouée avec le territoire parcouru et une osculation quasi psychanalytique des êtres et des lieux qu’ils habitent. Alors que se construit devant nous le portrait sombre et sans concession d’une Amérique bipolaire, persiste le désir pour une nation illuminée de ses mythes fondateurs.
Cette photographie du temps suspendu nourrit alors la possibilité d’une contemplation où rien ne compte plus que la question de la présence au monde dans sa totalité, délivrée de l’obligation de l’événementialité de la photographie.
Loris Gréaud + Yvon Lambert Broccoli
1988 (19.05 – 05.09.2021)
Les œuvres présentées dans cette deuxième exposition du programme Playground, dédié aux œuvres de la Collection Lambert, ont un point en commun : avoir été créées en 1988. À travers l’arbitraire du choix d’une date particulière apparaissent pourtant de nombreuses questions. Certaines sont liées à la constitution d’une collection d’œuvres d’art — de celle d’un marchand-collectionneur en particulier —, d’autres aux scènes existantes ou émergentes dans un espace temporel déterminé, ou encore à la mémoire du temps et des événements que les œuvres embarquent avec elles, aux liens qu’elles entretiennent avec la société dans laquelle elles naissent et s’épanouissent, à nos côtés.
1988 est certainement l’une des dates qui revient le plus souvent dans la vie de marchand et de collectionneur d’Yvon Lambert car elle marque à la fois l’inoubliable exposition de Jean-Michel Basquiat dans sa galerie parisienne — la première en France pour lequel l’artiste a produit des œuvres spécifiques — et la mort à 27 ans de celui que le monde de l’art, sous les mots de Rene Ricard, nommait The Radiant Child. Elle symbolise une période charnière qui voit, en Europe et aux USA, la peinture revenir d’un monde des morts où certains l’avaient trop rapidement expédiée. En témoigne ici la présence de Robert Combas et Loïc Le Groumellec.
Elle voit une certaine photographie investir définitivement le monde de l’art, à travers le geste d’hommes et de femmes qui se définiront comme des artistes — tel Andres Serrano, Louise Lawler ou Louis Jammes — utilisant le médium qu’ils considèrent comme le mieux à même de questionner nos rapports à l’image dans une société ultra médiatique.
Louise Lawler, Je vous ai écrit; verres sérigraphies et étagères
1988 est assurément encore le terrain de jeu des artistes issus des nouvelles avant-gardes des années 1960 — l’art minimal et conceptuel, le land art — tels Sol LeWitt, Joseph Kosuth ou Jonathan Borofsky, et nous prouve ainsi qu’il est inopérant de s’obstiner à considérer l’histoire de l’art à travers la seule linéarité du passage du temps qui verrait se succéder mouvements et scènes artistiques. Il est davantage intéressant de remarquer comment dans une même année des scènes émergent aux côtés de gestes plus anciens avec lesquels elles coexistent, que ce soit par la rupture, la réappropriation, l’inspiration, le dialogue.Liste d’artistes :Jean-Michel Basquiat, Jean-Charles Blais, Jonathan Borofsky, Robert Combas, Federico Guzmán, Louis Jammes, On Kawara, Anselm Kiefer, Joseph Kosuth, Louise Lawler, Loïc Le Groumellec, Sol LeWitt, Kay Rosen
Yan Pei-Ming, Tigres et vautours (26.06 – 26.09.2021)La double exposition de Yan Pei-Ming dans la Grande Chapelle du Palais des Papes et à la Collection Lambert, s’inscrit dans la longue histoire des expositions organisées avec le palais pontifical. Nombreux sont les projets menés par l’artiste ces dernières années à avoir été étroitement associés à un lieu emblématique : à la Villa Médicis, au Louvre, au Musée d’Orsay, au Musée Courbet ou au Musée du Petit Palais.
Aujourd’hui encore, à travers cette nouvelle exposition, Yan Pei-Ming révèle toute l’ambition d’une œuvre pleinement ancrée dans le monde contemporain, mais dont l’essence même se révèle à travers une appréhension très large de l’espace et du temps, qui mobilise aujourd’hui le passé pour que nous regardions le présent avec une conscience renouvelée, sans cesse mise à l’épreuve.
À la Collection, sont exposées près de 40 œuvres de l’artiste issues de presque 40 ans de pratique artistique. Les figures d’Innocent X, Paul III, Bruce Lee, Marilyn, Martin Luther King, Lee Harvey Oswald, John F. Kennedy ou Mao, partagent les salles du rez-de-chaussée des hôtels particuliers avec les portraits d’hommes et de femmes – militaires américains, clandestins et enfants soudanais, prostituées, visages inconnus, père et mère de l’artiste – ainsi qu’avec des paysages imaginaires d’exode ou les représentations d’animaux sauvages.
Toutes et tous nous racontent le pouvoir qu’a la peinture de Yan Pei-Ming d’embrasser d’un seul coup des siècles d’histoire pour y embarquer, aux côtés des figures qui ont façonné le monde, les destins inconnus de ceux qui constituent ces peuples que l’histoire « regarde directement » pour reprendre la formule de Georges Didi-Huberman.
Né à Shanghai en 1960, il vit et travaille à Dijon et Ivry-sur-Seine. Diplômé en 1986 des Beaux-Arts de Dijon, l’artiste a rencontré le succès avec ses peintures centrées sur le genre du portrait. Ses tableaux se caractérisent par l’uniformité du coloris, de grands tracés noirs et blancs, où s’insinuent des touches rouges. Sa participation à la Biennale de Venise en 2003 l’a consacré sur la scène internationale. Six ans après, le Musée du Louvre l’accueillait pour une confrontation avec La Joconde déclinée dans une suite de tableaux. En 2019, il célébrait au Petit Palais et au Musée d’Orsay le bicentenaire de la naissance de Courbet à travers deux expositions.
Peinture, monumentalité, palette épurée–où noirs, blancs et gris sont contrebalancés par du rouge–, obsession du portrait et de l’auto-représentation tels sont quelques traits de son œuvre prolifique qui commente avec acuité le monde contemporain tout en se nourrissant d’un dialogue ininterrompue avec l’histoire de l’art. Le peintre désirait exposer dans la Grande Chapelle du Palais des papes depuis longtemps. L’invitation de la collection Lambert et de la Ville d’Avignon à concevoir une double exposition sur le commissariat général d’André Loyrette lui en aura donné l’occasion.
Mimosa Echard, Sluggy me (jusqu'au 26 septembre 2021)Après une première présence à la Collection Lambert à l’occasion de l’édition 2020 du Festival Viva Villa ! Mimosa Echard revient à Avignon à l’été 2021 pour une exposition personnelle. Elle investit les 600 m2 du premier étage de l’Hôtel de Montfaucon pour une installation inédite, conçue pour les espaces même du musée.
Une exposition… À l’occasion de la 75ème édition du Festival d’Avignon, Théo Mercier a été invité à la Collection pour investir les salles du sous-sol ainsi que l’auditorium, dans lesquels il propose Outremonde, biotope collaboratif organisé autour d’un double dispositif d’exposition-décor et de spectacle activé durant le festival de théâtre.
5, rue Violette – 84000 Avignon (horaires et jours d’ouverture variables selon les mois)+ 33 (0)4 90 16 56 21
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