Les enfants du Paradis est une adaptation du chef d'œuvre de Prévert proposée dans l'un des plus beaux théâtres de verdure d'Europe.
Les enfants du Paradis est l'une des pièces proposées dans le cadre de la 9ème édition du Festival in Pré Catelan qui se déroule de juin à septembre dans le Théâtre de verdure du Jardin Shakespeare. C'est donc dans ce petit écrin de nature exceptionnel du bois de Boulogne que nous sommes allés redécouvrir ce classique de Jacques Prévert, adapté avec beaucoup de fraîcheur et de dynamisme. Une bien belle manière de reprendre le chemin du théâtre après notre épopée avignonnaise dans le cadre du Festival Off !
" Un spectacle pour ceux qui n'ont pas les yeux dans leurs poches ! "© Louve le Coadou
Une soirée au Paradis
Impossible de ne pas être immédiatement sous le charme de cette nature luxuriante. Dès notre arrivée dans ce lieu unique, il nous semble ne plus tout à fait appartenir à la même réalité ni à la même époque. D'autant que nous sommes tout de suite immergés dans le spectacle tandis que certains personnages clament ça et là des répliques, au contact du public qui pénètre et s'installe dans ce théâtre à ciel ouvert.
Le charme continue à opérer tandis que les cinq comédiens et trois comédiennes - qui interprètent chacun plusieurs rôles - s'approprient avec adresse et enthousiasme le texte tout en poésie et en humour de Prévert. Le décor naturel et enchanteur de ce cadre incroyable profite à la mise en scène de Lætitia Richard et offre un espace de jeu étendu et astucieux. Les comédiens évoluent tout autour de nous, sortent de scène par une grotte ou à travers les buissons pour reparaître un peu plus loin dans les feuillages, ce qui donne de l'amplitude à la pièce, du mouvement.
© Louve le Coadou" Paris est tout petit pour ceux qui s'aiment comme nous d'un aussi grand amour. "
Il y a de l'amour et de la poésie dans l'air !
Dans le Paris des théâtres du boulevard du Crime, la belle Garance fait tourner les têtes et chavirer les cœurs. Surtout celui du mime Baptiste, pourtant aimé par une autre dont il partage la vie. Il est rêveur et romantique. Garance, elle, est libre et légère, de ces femmes qui n'appartiennent jamais à personne, pas même aux hommes aux bras desquels elles apparaissent. " Je ne suis pas belle, je suis vivante. " rétorque-t-elle d'ailleurs à l'un d'eux, trop épris de lui-même pour remarquer qu'elle en aime un autre.
Cette relation entre Garance et Baptiste est aussi touchante qu'elle est rendue impossible par ce dernier, tellement intimidé qu'il laisse sa chance lui filer entre les doigts. Leurs rencontres, leurs échanges deviennent vite les moments que l'on attend, d'autant que les deux comédiens qui les interprètent - Anne-Laure Maudet et Dimitri Michelsen - ont un petit quelque chose en plus qui ensorcèle. Hormis peut-être dans les passages de pantomime dans lesquels ce dernier nous a un peu moins convaincus.
" Je vous en prie Baptiste ne soyez pas si grave, vous me glacez. Il ne faut pas m'en vouloir mais je ne suis pas... comme vous rêvez. Il faut me comprendre, je suis simple, tellement simple. Je suis comme je suis, j'aime plaire à qui me plaît, c'est tout. Et quand j'ai envie de dire oui je ne sais pas dire non. "
© Louve le CoadouUne adaptation très réussie, à quelques nuances près
Si l'ensemble tient fort bien la route et que la distribution est de qualité, le jeu des uns et des autres - de manière générale - mériterait néanmoins parfois de se détacher un peu du texte pour s'incarner davantage et gagner en nuances. Ce qui permettrait de mettre en relief la poésie et l'intensité émotionnelle de certains moments, et éviterait également les quelques longueurs qui peuvent s'installer.
Pour autant, c'est un très bon moment que l'on passe aux côtés de cette troupe animée d'une belle énergie, qui fait revivre les répliques savoureuses de l'un des plus grands films du cinéma français. La création musicale, la mise en scène, les costumes, ou encore la manière dont les éclairages viennent peu à peu remplacer la lumière du jour qui décline, habillent l'ensemble d'une couche de poésie supplémentaire dont on s'extrait un peu à contrecœur au terme de deux heures absolument réjouissantes !