De loin : Carnet de correspondante
Un nom à coucher dehors. Vlahovic, c'est le nom de famille de Marine. Correspondante en Palestine pendant trois ans pour Radio France.
Correspondante. Pas envoyée spéciale. Marine commence par expliquer ce détail avant de vider son sac : les premiers sont pigistes - payés à la tâche - à l'autre bout du monde, se démerdent comme ils peuvent pour se loger, bouffer et survivre; les seconds sont des expat', calés bien au chaud dans des appart' cosy et voyageant tout frais payés en plus du salaire.
Marine a enregistré tout le temps. Ses reportages au ton de voix monocorde et tout le reste : ses pétages de câble, coincée derrière son volant à un checkpoint, ses soirées folles dans la night palestinienne, sa logeuse qui l'a dans le nez ou ses plans cul et leur drague foireuse.
La sensation de vivre son quotidien, sa précarité, ses grosses flippes, ses moments de solitude et tout le reste est un panard absolu.
Le résultat déboîte.
De près : Tout fout le camp
Au bonheur des langues. Le voyage se passe d'abord dans le temps, en confrontant la langue des jeunes d'hier aux oreilles de celles et ceux d'aujourd'hui. Puis les linguistes se mêlent à la conversation ; l'argot aussi, avec des archives d'Arletty, de Coluche ou de Renaud montrant leur travail d'appropriation d'une certaine façon de parler pour le diffuser au plus grand nombre.
Le voyage se poursuit dans l'espace, en banlieue et pas en banlieue. Un certain vocabulaire va et vient naturellement pour certains, est adopté passivement par d'autres, par mimétisme ou conformisme.
Il est question de nostalgie, de classes, de déterminisme social, de ségrégation spatiale, d'inventivité, de jeunisme. Entre autres. Il est question de quelque chose qui n'existe pas et qui est pourtant bien vivant, qui évolue, qui circule, qui cantonne autant qu'il définit ou qu'il singularise : le langage.
C'est passionnant et dense.