Grégory Rateau – Sans elle

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

Quarante années à user du bon mot
A chercher un sens nouveau
Pour quoi faire ?
Pour quoi dire ?
Éprouver aujourd’hui toute la prégnance du vide
Du non-mot, du « mort-mot »
Ne plus rien avoir à dire
A personne
Toutes ces nuits sans elle
A l’imaginer sanglée
Sur son lit de ferrailles
Des néons lui rentrant dans le crâne
L’empêchant de rêver
Seulement des cauchemars, des caresses volées
Jusqu’à ce qu’elle rentre enfin d’HP
Livide malgré sa frénésie de chair
Le bonheur à réinventer
Le fantasmer pour deux, pour quatre
Jusqu’à ce matin
Le sentiment terrible dans ses yeux
D’être un étranger
Et après ça, tout à recommencer encore et encore
Les enfants à consoler
S’occuper des autres pour ne pas avoir à y penser
Jusqu’à cette nuit glacée
Face à la page
A ce silence jusqu’au bout des doigts
Le même vide
Art d’agrément
Hygiénisme du réel
Qui ne la fera pas se sentir mieux
Qui ne la ramènera pas dans les draps
La même impuissance
Et l’impossibilité à présent de l’exprimer

***

Grégory Rateau (né en 1984 à Drancy)