Un Ghostwriter est un « écrivain fantôme », celui qui écrit pour et à la place des autres qui signeront un texte qu’ils n’auront pas écrit mais qu’ils auront payé.
Les Ghostwriters de Philippe Artières sont d’une autre nature. Ils écrivent dehors, sur des bouts de papiers, sur les murs, sur des banderoles et même sur les dos de leurs gilets jaunes, des textes, des histoires, des témoignages, des phrases, comme celle-ci : « Ce gilet jaune est le mien ; regarde : c’est mon écriture ». L’écriture manuscrite devient subversive. Philippe Artières consulte les archives, celles des lettres de délation, mais aussi celles des gens qui portent témoignage : nombre de participants aux manifestations, observations d’évènements ; il faut « prendre date ». Le flux des messages publicitaires, des chaînes d’infos en continu, tout cela pousse à l’oubli comme poussaient à l’oubli ceux qui effaçaient les messages écrits sur les murs après la Commune de Paris. « L’écriture (manuscrite) rompt le flux, elle le grippe ». Il s’agit d’écrire une « histoire populaire commune ».
Philippe Artières est historien, spécialiste des écritures ordinaires :
Autobiographies de criminels,
La Banderole : histoire d’un objet politique,
L’invention de la délinquance graphique,
et beaucoup d’autres ouvrages.