Les Députés et les Sénateurs des Commission des finances et du budget des deux Chambres ont été sensibilisés à travers un atelier les 24 et 29 juin 2021, les enjeux de la rationalisation des dépenses fiscales.
La dépense fiscale tire sa source dans une Ordonnance du président de la République de 2008, à la suite de la crise sociale appelée grève de la faim du mois de février de la même année. On avait alors décidé de détaxer tous les produits de grande consommation comme le riz, le poisson congelé, le blé, le gaz domestique, afin de faciliter l'accès aux ménages les plus démunis à ces biens de première nécessité. C'était alors l'objectif principal pour lequel ces dépenses fiscales ont été octroyées. La dépense fiscale telle qu'expliquée par Modeste Mopa Fatoing, le directeur général des impôts, à l'occasion de l'atelier parlementaire organisé par le ministère des Finances, en vue de sensibiliser les Députés et les Sénateurs les 24 et 29 juin derniers, à Yaoundé, sur la rationalisation de cette dépense : " Au lieu de collecter l'intégralité des impôts et taxes sur toute la matière imposable, dans le cadre du budget de l'Etat et de procéder à une allocation de ce budget en fonction des priorités des autorités, c'est-à-dire la dépense, le législateur décide par anticipation de ne pas collecter ces impôts et taxes et de subventionner directement un certain nombre d'activité ".
Et pour être plus explicite, le directeur général des impôts, a illustré son propos par des chiffres, devant la Commission des finances et du budget des deux Chambres. " Les dépenses fiscales de l'exercice 2019, période de référence (...) se sont chiffrées à 584,7 milliards FCfa. Cela veut dire que l'Etat en 2019, a renoncé à prélever les impôts pour 584,7 milliards FCfa, en subventionnant directement un certain nombre de secteurs d'activités de biens et équipements. Sur ces 584,7 milliards FCfa, vous constaterez qu'ils représentent 25% de nos recettes fiscales non-pétrolières. Nos recettes fiscales non-pétrolières et les recettes collectées par la DGI, la DGT, les recettes non-fiscales se chiffrent à 2784,6 milliards FCfa. Donc, ces 584,7 milliards FCfa représentent également 2,6% de produit intérieur brut (PIB), qui lui, est évalué à 22962 milliards FCfa. Dans ces 584,7 milliards FCfa de dépenses fiscales, 45% sont consacrés aux biens de consommations courantes, c'est-à-dire le riz, le poisson congelé, le blé, le gaz domestique ", a-t-il détaillé.
Dès ce moment, la question peut de poser de savoir si en procédant ainsi, les ciblages sont bien faits et l'administration de la dépense fiscale est au final efficace. Les conclusions issues de l'enquête sur la consommation des ménages de 2014, renchérit Modeste Mopa Fatoing dans son exposé devant les parlementaires, montrent que ces exonérations profitent seulement aux ménages riches à hauteur de 46,8% ; contre seulement 4,6% aux ménages pauvres, parce que le bénéfice de la dépense fiscale, comme l'a démontré le directeur général de l'Institut national des statistiques, Joseph Tedou, lui aussi intervenant au cours de ces ateliers, tout comme Fongod Edwin Nuvaga, des douanes, est fonction du pouvoir d'achat, donc, du niveau de consommation et non de la taille du revenu. Il apparaît de façon évidente que l'objectif de la dépense fiscale de départ, quelques années plus tard, n'est plus le même, et fait plutôt perdre des recettes à l'Etat. D'où l'importance de changer de paradigme. Les parlementaires des deux Chambres, meilleurs vecteurs du message aux populations, ont été en phase après les exposés et les débats qui s'en ont suivi sur le fait de rendre la dépense fiscale plus efficace.