Pourquoi le rapport de la Chambre des comptes sur les fonds dédiés à la lutte contre le coronavirus, tant attendu, n’a plus été présenté à l’Assemblée nationale? La réponse est venue d’un haut cadre du Rdpc.
Au cours de l’émission «Droit de réponse» à Equinoxe télévision le 27 juin dernier, un militant du Rassemblement démocratique du peuple camerounais, le Pr Pascal Charlemagne Messanga Nyamding, bien connu des téléspectateurs camerounais, qui persiste systématiquement à se présenter comme l’un des plus zélés des «Biyaïstes», a montré qu’il pouvait convulser à l’idée que le rapport de la Chambre des comptes allait être présenté à l’assemblée nationale le 25 juin 2021, comme initialement et officiellement annoncé par l’Assemblée nationale. C’est avec emphase qu’il a rappelé comment il avait prié, en sa qualité de chef traditionnel, afin que ce brûlot ne soit jamais rendu public. Parce que, soutient-il avec force, la publication de ce texte ferait l’effet d’une bombe de nature à faire exploser le gouvernement de la République. Donc, à faire voler en éclats le régime de son mentor, le président Paul Biya. Et sa conclusion, c’est que le rapport de la Chambre des comptes de la Cour suprême sur le scandale de de la gestion des 180 milliards dédiés à la lutte contre le coronavirus ne sera jamais publié sous le régime Biya.
Cette position ne vient pas d’un membre du gouvernement. Mais lorsqu’on considère le profil de la personnalité, on peut commencer à comprendre les raisons pour lesquelles la publication d’un rapport à l’allure de la proclamation des résultats d’une élection très attendue par l’opinion nationale et internationale, les partenaires bilatéraux et multilatéraux, les organisations non gouvernementales, a été reportée sine die. Plus de 48 h après le report de cette cérémonie aussi sensible, il n’y a toujours aucune explication officielle. Il faut d’ailleurs rappeler que le premier rapport dit «rapport d’étape», avait plutôt fuité des tiroirs des bureaux à Yaoundé pour se retrouver dans les réseaux sociaux, après que la Chambre des comptes ait bouclé son travail depuis quelques temps. A ce jour, on ne sait point l’origine de cette fuite. Mais il est évident que la publication de ce document sensible n’était pas officielle, et a certainement pris les différents lobbies à contrepied. Alors, si la présidence de la république redoutait que ce rapport soit rendu public, qui a décidé cette fois de sa présentation officielle, et au complet, devant la représentation nationale, avec toute la solennité que cela comporte? On peut imaginer que le rétropédalage de la présidence de la République, moins de 24h après l’annonce de l’évènement, est illustratif des batailles qui se font autour de ce covidgate dont les conclusions sont pourtant exigées par le Fonds monétaire international.
Selon des informations de La Nouvelle Expression, même les responsables de la Chambre basse du parlement camerounais ont été surpris par l’annulation de cette audience spéciale. Des sources introduites révèlent surtout que l’instruction de reporter la séance de présentation de ce rapport de la Chambre des comptes est venue de la présidence de la république. Mais de qui précisément à Etoudi ? C’est un véritable mystère. On se rappelle pourtant que sur très hautes instructions du président de la République, le ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, avait demandé au ministre de la justice de faire diligenter une enquête judiciaire, afin de mettre la main sur les responsables et leurs complices
Les dernières informations autour du Covidgate indiquent que plus d’une vingtaine de membres du gouvernement ont déjà défilé devant le tribunal criminel spécial. Et de toutes les dépositions, il se forme une toile d’araignée de covidegate qui peut finalement enlacer des centaines de hauts fonctionnaires et d’opérateurs économiques. «La plus grosse prise que l’opération épervier pouvait faire, si telle était la volonté de Paul Biya», complète laconiquement un homme du sérail. Avant de conclure: «malgré la très forte pression qui s’exerce sur le président de la république, il ne sacrifiera que quelques malchanceux. Et c’est aussi la crédibilité de la Chambre des comptes qui est mise en jeu».