Entre les cigarillos bavards
L’air est chargé de Bacalhau
De Caldo verde du jour
Relents d’un film noir
Un homme se remet un manuscrit à lui-même
Le regard suspect et arrondi
Son feutre gris « déjà » immortel
Sa mine cireuse de fonctionnaire
Ne trahit en rien sa couverture
Personne ne fait attention à lui
Perdu dans une triste mosaïque
Il converse avec une chaise vide
Tantôt surpris, tantôt dédaigneux
Indifférent au défilé des jambes des Portugaises
Une tendresse inaccessible à son complet trois pièces
Il se contente d’empiler ses impressions
Des poèmes mystiques
Des horoscopes drolatiques
Des portraits robots sans suite
Le tout bien empaqueté dans une grande malle
Il rêve d’être compris mais il y renonce aussitôt
Seule la mort lui ouvrira les portes de la multitude
Tour à tour Alberto Caeiro
Ricardo Reis
Álvaro de Campos
Bernardo Soares
Il deviendra même une statue
La chaise libre en face de lui
A présent toujours occupée
S’y croisent et s’y décroisent
Les jambes des femmes du monde entier
***