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Cameroun – Hygiène : Ces hommes qui ne changent pas leurs dessous

Publié le 25 juin 2021 par Tonton @supprimez

Deux, trois, quatre, parfois cinq jours … Combien de temps faut-il à un homme pour changer son bermuda. Les réponses divergent.

C’est le bermuda de couleur bleu clair, devenu presque noir d’un jeune homme qui a suscité cette enquête. Jeune garçon, (en camerounais) « yor » de son état, tout parfumé, son pantalon jeans est toujours au niveau du fessier. Son t-shirt pas très long laisse transparaître le sous-vêtement qu’il porte et visiblement sa couleur. Pendant une semaine, nous sommes appelés à nous rencontrer pour la formation de premiers secours dans une école à Yaoundé. Tout au long de cette période, les yeux qui n’ont pas de « direction » comme on le dit souvent nous chez au Cameroun, nous ramènent sans cesse sur le fessier du jeune homme. C’est visiblement le même bermuda décrit plus haut, l’aspect sale et défectueux que l’on voit de lundi à vendredi. Interrogation un peu personnelle, à la fois gênante, mais nous sommes entre amis. Sans ambages on fonce. « Gars, dis-moi c’est le même bermuda que tu portes depuis lundi là ou bien tu en as plusieurs de la même couleur ? ». Sans gêne, le jeune homme répond : « puisque nous sommes entre amis, oui, c’est le même ».

Je suis sans mot dire. Mais mon regard perplexe trahit mon étonnement. Comment cela pourrait se faire ? Lui aussi visiblement étonné, avec l’air d’avoir compris mon étonnement rétorque gaillardement : « Est-ce que je suis une fille ? C’est toi qui dois te préoccuper des affaires de sous-vêtements tous les jours, parce que tu es une femme. Je suis un homme ; ça ne me concerne pas ». Ça n’a l’air de rien. Cela fait même rire certains dès qu’on aborde le sujet. Les plus pudiques s’offusquent. Ils font mine de ne pas croire que cette pratique chez certains hommes est vraie. « Vraiment un bermuda c’est pour une journée. Dès qu’on prend son bain, on l’enlève », répond Pierre N. enseignant. Un communicateur estime qu’il y aurait une catégorie d’hommes faisant un métier pour n’adopter que ce comportement.

Or que non. D’autres savent que cela se fait chez les hommes « normaux », occupant de grands postes et que beaucoup d’entre eux n’en parleront pas par galanterie. Guy témoigne, en riant : « Il y a des hommes, des pères comme moi qui le font. Mais ils ne diront pas la vérité, parce qu’ils ont honte. J’ai un de mes amis qui est maître en la matière. Si ses dessous ne font pas une semaine, il ne les change pas ». Lui-même affirme mettre un sous-vêtement pendant deux jours : « C’est le deuxième jour que je considère qu’il faut déjà le changer et le laver ». Comme lui, certains ont dit ce qu’ils font sans hésitation ; car pour eux, cela est tout de même normal. Ils sont des hommes. Quatre à cinq jours. C’est le nombre de fois que Arsène, un étudiant qui a accepté de répondre et d’être clair, porte son bermuda. Le jeune homme de 23 ans s’en passe des sueurs et autres.

D’ailleurs il n’en a que trois dans son dressing. Au Carrefour Régie ici à Yaoundé, nous allons vers les mototaximen. La question fait rire plus d’un. Pendant que, assis sur leurs motos, certains font la fine bouche, en disant qu’ils portent leurs dessous pendant un jour, Ernest, leur collègue, affirme avec énergie : « Arrêtez de mentir ! On se connait. En tout cas, je dis ma vérité : je fais trois jours avec mon bermuda ; je ne suis pas une femme ». Réaction : tous éclatent de rire et certains renchérissent : « C’est vrai que je fais parfois deux jours avec le mien ; mais, pas trois jours. Mon frère, tu exagères »… A l’écart, Amadou, un autre mototaximan qui les écoute religieusement balance sans façon ; « On fait même quoi avec les bermudas ? J’ai seulement un seul. Je n’aime même pas porter les caleçons ». Là encore, c’est un fou rire général.

Au sein d’un bureau de communication, la discussion à ce sujet est ouverte. Même attitude, certains s’en offusquent et ont l’air étonné. Mais, deux cadres se livrent. Le premier affirme porter le sien pendant trois jours au minimum. Explication : « J’estime que ce n’est pas encore sale pendant les deux premiers jours ». Il change son bermuda le premier jour à une exception et une condition : « Que j’ai fait un exercice physique comme le sport ou le travail manuel ». Le second dit porter des « shorts » : « Je ne supporte ni les bermudas, ni les caleçons ». Cependant, il met une même culotte pendant deux à trois jours. Sur les raisons ? Lui-même n’en sait rien à part le fait qu’il n’est pas une femme.

Thérèse, une épouse ordinaire raconte ses démêlés avec son homme, enseignant, au sujet du port de bermuda : « S’il ne fait pas trois jours avec son bermuda, il ne le change pas. Pour que ça se fasse, il faudrait qu’au bout de la première ou deuxième journée, je trempe son dessous dans l’eau pour qu’il le change ». M. Atangana retraité et veuf, a également eu à subir les choix de sa femme à ce sujet : « Madame ne tolérait pas que je porte un même bermuda pendant plus de deux jours. Elle me l’arrachait des mains et allait le laver». L’autre aspect aussi sur lequel la majorité des hommes avec qui nous avons échangé ne s’attarde pas, c’est la qualité du tissu dont les sous-vêtements sont faits. En coton, en laine ou en nylon, il n’y a aucune différence.

Guillaume Aimée Mete


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