Les députés invitent le gouvernement à veiller à ce que l’ensemble de la population soit intégrée dans la Csu.
La question de la couverture santé universelle (Csu) a fait l’objet d’une séance plénière spéciale hier, 23 juin 2021, à l’Assemblée nationale. Le ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie est venu faire l’état de la mise en œuvre de ce nouveau système au Cameroun auprès de la représentation nationale. Il ressort des échanges que le coût de départ s’est avéré lourd pour le trésor public ; ce qui a été revu à la baisse. « Aujourd’hui nous avons déjà passé un contrat de partenariat public-privé pour pouvoir déployer le matériel de l’enrôlement. Le partenaire privé va pouvoir faire également la collecte et le rachat des soins. La partie camerounaise va s’occuper du dossier technique parce que nous avons la gestion de ces dossiers de validation des soins qui sont faits ». Les data center qui sont des équipements lourds pour pouvoir faire de l’hébergement des données sont à 80% de construction. Les équipements d’enrôlement ont été commandés. Sur le plan réglementaire, un avant-projet de loi a été élaboré et en cours d’examen par le gouvernement. « A notre niveau, nous avons élaboré déjà et discuté avec l’ensemble des partenaires du secteur. Sept autres projets de décret vont aller avec l’avant-projet de loi. Voilà où nous en sommes. Nous sommes en train de travailler. Le comité paritaire a été mis en place. Le groupe technique qui a suivi tout le processus depuis 2015 est en cours. Nous sommes venus porter l’information aux députés », a souligné le ministre.
Un avant-projet de loi
Selon l’Etude organisationnelle du système de financement de la santé (Oasis) et les Comptes nationaux de la santé, le contexte de la mise en œuvre de la Csu au Cameroun est marqué par les indicateurs suivants : une forte fragmentation des mécanismes de financement de la santé ; un taux de couverture de la population par un mécanisme de protection sociale en santé de 6,46% ; un taux de couverture en service de santé essentiel de 40% ; un taux de contribution des ménages de 70,27 % dans les dépenses totales de santé, s’effectuant uniquement par paiement direct. D’où la définition d’un système de Csu devant impérativement répondre aux spécificités propres au Cameroun, « nous avons tout au long de ce processus de préparation de mise en place, adressé trois questions principales relatives aux renforcements de l’offre de santé, à l’organisation de la demande, à la gouvernance et au financement », a précisé Manaouda Malachie. Ces questions incluent les protocoles de soins, pour l’amélioration de la prise en charge des maladies par la mise à disposition d’un référentiel qui s’arrime aux normes dans le secteur ; l’élaboration de la méthodologie de ciblages des personnes pauvres et vulnérables dans le cadre de la Csu ; l’élaboration du cahier de charge pour le système d’information et de gestion de la Csu…
Pour ce qui est du financement de la Csu, un modèle a été proposé au gouvernement.
Ce modèle repose principalement sur les principes de : la pérennité (autonomie de financement et stabilité des sources de financement) ; la non aggravation des charges fiscales des entreprises ; la réaffectation (dotations budgétaires et prélèvement fiscaux et parafiscaux) ; la contribution substitutive (30% des revenus à la couverture des dépenses de santé et réorientation de la contribution des salaires dans un plafond de 5%) ; le principe d’universalité et de solidarité nationale (prise en compte des indigents et des camerounais économiquement faible et financement de l’État). De façon générale, plusieurs sources de financement de la Csu ont été ainsi retenues, parmi lesquelles : les contributions sociales des assujettis, les dotations budgétaires, les prélèvements proportionnels sur les salaires des secteurs publics et privés et les taxes.
Les députés montent au créneau
Malgré les efforts du gouvernement, le taux de couverture est faible bien qu’en nette évolution, a martelé le vice-président de l’Assemblée nationale, Théophile Baoro. Il urge d’accélérer la mise en œuvre de la Csu afin d’offrir aux populations des soins de qualité car la demande est de plus en plus forte ; ceci passe par un relèvement du plateau technique des hôpitaux. Pour une élaboration juste et la prise en charge équitable, les députés ont formulé des recommandations car la Csu est une affaire de tous. Le gouvernement doit : veiller à ce que l’ensemble des populations toutes catégories sociales confondues soient pleinement intégrées dans les mécanismes de Csu en respect du devoir de solidarité nationale ; qu’un accent particulier soit mis pour l’intégration complète des zones rurales et des personnes exerçant les métiers agro-pastoraux ; que des structures, processus et mécanismes d’alerte et de gouvernance soient mises en place pour assurer l’équilibre financier de la Csu et sa pérennité ; qu’une campagne d’information et d’explication médiatique et physique associant les élus nationaux et locaux et diverses associations dans toutes les villes et villages du pays soit menée afin d’éviter de faire de la Csu, un processus de prise en charge élitiste.
Ces mesures misent en pratique pourront aider à relever le niveau des soins car selon l’Organisation mondiale de la santé (Oms), le taux de couverture de la population en services de santé essentiels était de 45,90 % en 2017. Ce qui est loin d’être satisfaisant.