En dépit des textes juridiques qui existent, ces jeunes sont encore, pour la plupart, livrés à eux-mêmes, maltraités ou coincés dans la nasse des conflits.
La société camerounaise est de plus en plus violente. A l’école, à la maison ou encore sur la toile, personne n’est à l’abri. Cette gangrène gagne du terrain. Elle a d’ailleurs connu une recrudescence dans les établissements scolaires ces derniers mois avec en prime, des morts. Les premières victimes sont inéluctablement les enfants. Selon des experts, c’est en période de crise que les violences contre les enfants sont les plus prononcées. Ces dernières années, le Cameroun fait face à de nombreux conflits. Dans la crise qui sévit depuis plus de 4 ans dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, les enfants ont payé et continuent d’ailleurs de payer le prix fort.
Les statistiques sont éloquentes à ce propos. Le rapport du Secrétaire général de l’Organisation des nations unies (Onu), Antonio Guterres, publié le 1er juin 2021 indique que, 700 000 enfants ont été privés d’école à cause des crépitements de balles et l’insécurité régnante dans cette partie du pays. Les attaques de Boko-Haram ont également touché toutes les strates de la population.
Selon le directeur des programmes à Plan Cameroon, Dr Collins Sayang, « Ces conflits ont touché et persistent à toucher les enfants de différentes manières. Environ 38 enfants ont été utilisés pour perpétrer des attentats-suicides dans les régions du Lac Tchad depuis le début de l’année ; ce qui porte à 86 le nombre total d’enfants utilisés dans ce type d’attaque depuis 2017 ». Et de préciser que : « Près de 644 adolescents dans ces régions disent avoir peur d’aller à l’école et dans des centres de santé en raison de la présence militaire et des harcèlements, le viol, les balles perdues, les tirs croisés, la violence et la répétition d’attaques contre des écoles ».
Conséquences des violences
Ces violences peuvent avoir des conséquences graves chez l’enfant. Elles peuvent causer l’anxiété, les pensées suicidaires, les grossesses non désirées, la sexualité à risque… Les enfants qui grandissent dans un environnement violent sont susceptibles à les perpétuer autour d’eux. Dans le bulletin d’informations et de statistiques sociales publié par le ministère des Affaires sociales pour le compte du 4ème trimestre de l’exercice 2020, pour ce qui est des traumatismes subis par les enfants, les unités techniques opérationnelles ont assuré la prise en charge multiforme de 2478 dont 1074 ayant subi des sévices corporels, 977 victimes d’exploitation économique et 427 victimes des viols.
A en croire le bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (Unocha), la malnutrition chronique touche actuellement 40 % des enfants dans le Grand Nord. Aujourd’hui 2 enfants sur 3 sont enregistrés à la naissance. Et parmi eux, seulement 1 sur 2 dispose d’un acte de naissance. Ces enfants sont vulnérables aux trafics et aux exploitations. 3 filles sur 10 sont mariées avant l’âge de 18 ans. Ces filles sont sujettes à nombreuses formes de violence, déplore le représentant du Bureau de l’Unicef au Cameroun, mercredi 16 juin 2021 à l’Assemblée nationale. C’était à l’occasion de la plénière spéciale de plaidoyer pour le renforcement du cadre juridique et institutionnel de protection des enfants contre les violences.
Les députés appelés au secours
Face à cette situation de plus en plus préoccupante, les parlementaires ont un rôle à jouer dans le cadre de la lutte contre ces violences multiples (morale, physique…). Le 1er vice-président de l’Assemblée nationale, Hilarion Etong, a relevé pour le regretter que les violences contre les enfants ont pris des proportions inquiétantes. « Que ce soit en famille, à l’école ou dans la communauté, ces attitudes et comportements malveillants touchent les enfants de tout âge, des deux sexes, indépendamment de leurs origines, milieux de vie ou leur niveau d’éducation ». Et d’ajouter : « Nous espérons que cette rencontre débouchera sur des résolutions et des recommandations susceptibles de garantir à nos enfants, un cadre de vie plus épanouissant, dépouillé de toute forme d’agressions physique, psychologique ou morale ».
Les membres de la chambre basse doivent, à l’occasion de la célébration de la 31ème édition de la journée de l’enfant africain célébrée au Cameroun sous le thème : « protéger chaque enfant contre la violence, l’exploitation, les négligences et les abus : une priorité pour le gouvernement camerounais », formuler des recommandations pour le renforcement du cadre juridique institutionnel de protection des enfants contre les violences au Cameroun. Le ministre des Affaires sociales, Pauline Irène Nguene, a porté elle aussi ce plaidoyer à l’hémicycle hier.