Le ministre des finances a dû à nouveau s’expliquer sur l’accélération du rythme d’endettement du Cameroun.
Le projet de loi portant ratification de l’Ordonnance du 26 mai dernier, modifiant la loi de finances de l’exercice en cours en autorisant le gouvernement à procéder à de nouveaux endettements, a été adopté par le Parlement. Toutefois, il n’est pas passé comme une lettre à la poste. En effet, le ministre des Finances a été appelé à s’expliquer sur le regain d’endettement que connait le Cameroun. « Ce contre quoi nous n’avons eu de cesse de mettre le Gouvernement en garde ici est en train d’arriver…Ne pensez-vous pas Monsieur le Ministre que c’est la corruption et la gabegie qui ont entrainé une lente absorption des crédits, lesquels ont contribué à dénaturer le modèle économique initial des différents projets tout en les rendant improductifs», a par exemple demandé l’honorable Cabral Libii? «Le gouvernement veut contracter de nouvelles dettes pour rembourser des anciennes…Si vous vous souvenez du débat que nous avons eu ici en nombre lors de l’adoption du projet de loi de Finances, nous nous interrogions déjà sur la pertinence des prévisions budgétaires…comment comprendre qu’en moins d’un an, le gouvernement revienne devant l’Assemblée pour demander la modification d’un budget? Comment justifier que vos experts ne soient pas capables de faire des prévisions qui tiennent sur 12 mois», a ajouté l’honorable Koupit Adamou?
«Bonne dette»
Des questions que le ministre des Finances a balayées du revers de la main. Selon Louis Paul Motaze, de fausses informations sur l’endettement du pays sont véhiculées par les parlementaires et les journalistes. «Nous en avons déjà parlé à plusieurs reprises et nous serions disposés à ce qu’il y ait un séminaire d’information sur l’endettement. On dit tout et le contraire de tout. Ce que le gouvernement a dit est vérifiable, nous ne restons pas dans nos bureaux pour déterminer de façon arbitraire que voilà le niveau d’endettement, surtout que cet endettement est contrôlé par des institutions financières internationales».
Concrètement, selon le Minfi, les discours appelant à ralentir le rythme d’endettement sont illogiques dans le contexte actuel. «Le Gouvernement a une politique et je veux que nous le comprenions tous. Le problème n’est pas la dette. Il y a des bonnes et des mauvaises dettes…Combien de fois les Camerounais se plaignent qu’il y a encore des délestages ? Ils ont raison. Mais comment voulez-vous résoudre ce problème si vous ne construisez pas de barrage ? Ça c’est de la bonne dette. C’est-à-dire des opérations d’endettement qui vous permettront d’améliorer la situation de l’économie. On ne peut donc pas se focaliser sur ces histoires-là; ne nous endettons pas, ne construisons pas de barrage, mais ne nous plaignons pas d’avoir des coupures, c’est un choix».
Accroissement de la dette
Le gouvernement se défend dès lors d’accroitre la dette du Cameroun qui approche les 9700 milliards de F Cfa. Selon Louis Paul Motaze, l’ordonnance du 26 mai 2021 ne vise pas à terme à accroitre la dette, mais plutôt à rembourser les précédentes. « Il ne s’agit pas d’une nouvelle dette. Il s’agit d’une dette qui chasse une autre parce que les conditions sont meilleures. Nous n’accroissons pas la dette de 450 milliards. Nous recherchons 450 milliards en espérant à des meilleurs taux pour rembourser les premiers 450 milliards. Cela a au moins deux avantages : le premier avantage comme je l’ai dit c’est que la dette qui était extrêmement cher, on l’enlève. Le deuxième avantage c’est que nous faisons glisser les périodes de remboursement. Si ça partait de 2023, 2024, 2025, nous renvoyons ça à plus tard, en espérant que l’économie va rebondir. C’est pour cela que je dis que c’est une gestion stratégique de l’Etat»
Une stratégie gouvernementale qui n’est toutefois pas véritablement visible au niveau de l’utilisation des dettes dans le cadre du financement des projets. En effet, bon nombre de ceux-ci ne sont pas parvenus à terme malgré des endettements destinés à leur réalisation. C’est notamment le cas de certains projets contenus dans le Plan d’urgence triennal.