Cameroun – Diagnostic : La gestion de Camair-Co en question

Publié le 11 juin 2021 par Tonton @supprimez

Dans sa thèse de doctorat PhD, qu’il a défendue avec brio le 04 juin à Douala, Dr Jopel Ngoua-Elembe II décrypte les facteurs de la contreperformance dans le management de la compagnie aérienne nationale sous asphyxie.

La gestion de la Cameroon Airlines Corporation (Camair-Co) est au centre d’une étude scientifique réalisée par l’intellectuel Jopel Ngoua-Elembe II Hiob sous le titre « Profil du dirigeant et dynamique de positionnement stratégique de l’entreprise ». L’étude, qui a par ailleurs fait l’objet d’une thèse de doctorat PhD en filière gestion, défendue le 04 juin 2021 par le candidat Ngoua-Elembe II Hiob, montre « comment la vision, la personnalité, le niveau de formation et les compétences spécifiques d’un dirigeant permettent d’expliquer, en fonction des facteurs environnementaux, le succès ou l’échec d’un mode de positionnement donné au sein de Camair-Co ». C’est du moins en ces termes que l’auteur formule la proposition principale de sa recherche, qui le conduit vers une approche comparative.

Comparaison d’avec d’autres compagnies africaines comme Ethiopian Airlines, « major du ciel » dans sa sous-région, ou encore Air Ivoire, pour ne citer que celles-ci. Mais qu’est-ce qui explique donc que ces compagnies nationales soient plus compétitives, à l’échelle du continent africain, que la compagnie aérienne nationale camerounaise, créée en 2006, avec, au départ du vol inaugural, le 28 mars 2011, un capital de 500 millions de francs CFA, loin en-deçà du milliard et demi (1,5 milliard) de francs CFA de la défunte Cameroon Airlines (Camair), au début de son exploitation en 1972, et du capital d’Air Ivoire, revu à la hausse à 65 milliards après 2015 ? Ngoua-Elembe II Hiob explore les facteurs de contreperformance d’une compagnie nationale constamment sous perfusion financière, que le gouvernement subventionne la plupart du temps selon ses humeurs, parfois à hauteur d’à peine 10 milliards l’an.

100 milliards F CFA

Une bien maigre allocation qui ne peut même pas permettre à l’héritière de la défunte « onzième province » (Cameroon Airlines) de payer le carburant ou de réparer ses avions, selon le chercheur. Une dotation insignifiante et de loin inférieure aux 100 milliards, voire deux cents milliards dont la compagnie camerounaise a besoin pour redécoller et reconquérir le ciel africain. Question pertinente d’un membre du jury présidé par le professeur Claude Bekolo, doyen de la Faculté des sciences économiques et de gestion appliquée (Fséga) de l’Université de Douala : et si Camair-Co avait un chiffre d’affaires de 1000 milliards et possédait 1000 avions, la compagnie se porterait-elle mieux ? « Telle n’était pas ma question », répond l’auteur qui préconise, comme condition à tout redécollage, un toilettage préalable du bilan de la compagnie aérienne du Cameroun.

Selon Ngoua-Elembe II Hiob, le profil du dirigeant idéal souhaité et à rechercher pour Camair-Co, est celui de dirigeants d’Ethiopian Airlines, qui assure aussi bien le service de la navigation aérienne que du traitement au sol, contrairement à Camair-Co, dont le traitement au sol est dévolu aux Aéroports du Cameroun (Adc), la compagnie s’occupant uniquement du segment de la navigation aérienne. Ce n’est qu’alors que la compagnie aérienne camerounaise pourrait prétendre être le major du ciel dans la région atlantique. Les membres du jury ont été unanimes sur l’originalité du sujet, sa contextualisation et son enracinement, et sur l’approche de l’auteur, fût-elle qualitative. « Le sujet est intéressant et d’actualité très récente », a observé l’un d’eux. La recherche du docteur Ngoua-Elembe II est bourrée de données et nous apprend un peu plus sur le secteur aérien, même si des améliorations sont à faire en termes de formulation.

Des limites qui n’entravent en rien, cependant, « les qualités exceptionnelles » de ce travail sanctionné par une mention « très honorable » au terme du brillant exposé du candidat désormais docteur en gestion. Même si par ailleurs l’auteur aurait gagné par exemple à explorer le contexte, ou encore le profil de ses experts en expliquant comment ledit profil influe la dynamique de positionnement L’autre faiblesse tient au fait que l’auteur a travaillé autrefois à Camair-Co, où il a occupé les fonctions de directeur du département stratégie et planification. Une compagnie que le chef de Ndôngô Bwapaki, un village du canton Bankon Sud (Abo Sud), dans la commune de Bonaléa, connait au bout des doigts, même si le président du jury émet des réserves sur sa capacité à rencontrer tous les six dirigeants que la compagnie a vu se succéder en dix ans d’exploitation. Par conséquent, « il est possible qu’il (le chercheur) ait manqué d’objectivité », a déploré le professeur Claude Bekolo globalement convaincu et satisfait, autant que le professeur Biwole Fouda, qui a dirigé la thèse.

Théodore Tchopa