S'intéresser à la vision d'un architecte offre souvent un nouveau regard sur un édifice, sur lequel on ne poserait pas forcément les yeux spontanément. Le printemps dernier, j'avais ainsi réussi à apprécier les immeubles pyramidaux (décriés) de Jean Balladur à la Grande Motte, en les voyant comme un témoignage d'un courant architectural et en découvrant les inspirations de l'architecte (les pyramides mexicaines de Teotihuacan, le pic Saint-Loup etc). Sans oublier sa façon de considérer l'humain, et les fonctions que doivent à ses yeux remplir son habitat.
Alors lorsque le Centre des monuments nationaux m'a invitée à découvrir à Poissy la Villa Savoye ainsi que la Maison de fer, je n'ai pas hésité à accepter. Je l'avoue, je ne m'étais pas souvent rendue à Poissy et y aller en transport en commun m'a permis de voir que la ville était très facile d'accès depuis Paris. Le RER A nous y emmène directement en une demi-heure au départ de Charles-de-Gaulle étoile . A quelques minutes du RER, un bus (16, 24, 50, 55, 9) nous dépose à la villa Savoye, villa conçue par le célèbre le Corbusier pour la famille Savoye.
Vu de l'extérieur et sans aucune explication, on pourrait prématurément imaginer que cet édifice situé très en retrait de la rue n'a pas grand chose à nous apprendre. Mais on aurait tort de s'arrêter à cette première impression. Commandée par Pierre et Eugénie Savoye en 1928 afin d'en faire une maison de week-end à proximité du terrain de golf de monsieur, la villa a été conçue par Le Corbusier comme une "machine à habiter". Elle rassemble les cinq points d'une architecture nouvelle, formulés par l'architecte en 1927 : on y observe les pilotis, le toit-jardin, le plan libre, la façade libre et la fenêtre en bandeau, le tout conçu en béton armé.
Lorsque l'on déambule dans cette grande maison, on est immédiatement frappé par sa grande luminosité, qui a d'ailleurs incité les époux Savoye à la nommer ". Où que l'on soit, les fenêtres en bandeau nous offrent une vue quasi-ininterrompue sur la nature environnante, et le jeu d'ouverture avec les terrasses brouille les limites entre l'intérieur et l'extérieur. C'est surtout Les Heures Claires" le toit terrasse, conçu comme un solarium, qui m'a particulièrement séduite. Blanc, sobre, mais aussi grand (70m2), on s'y voit aisément faire bronzette à l'abri des regards.
En temps normal, il n'y a aucun mobilier dans la villa Savoye. Mais actuellement, et ce jusqu'au 26 septembre 2021, y a lieu l'exposition "Sièges modernes. Le Mobilier national invité à la villa Savoye." Dans les pièces de la maison, sont installés une vingtaine de sièges contemporains issus des collections du Mobilier national et conçus par l'Atelier de Recherche et de Création (ARC). Des pièces très bien mises en valeur par l'espace, et la luminosité du lieu.
On y retrouve entre autres un ensemble de pièces de Le Corbusier rééditées puis acquises par le Mobilier national, une chaise longue " face à face " de Pierre Paulin, installée dans la chambre des Savoye, la chaise Caddy d'Olivier Mourgue dans la cuisine, ou encore un fauteuil à bascule de Richard Peduzzi dans la chambre du fils.
Fauteuil visiteur Francesco Binfaré 2007 - Fauteuil Isabelle Serre 1983
1 - Canapés fauteuils et table basse Le Corbusier 2- Chaise Caddy Olivier Mourgue 1968
La visite se fait rapidement, et se combine donc parfaitement avec une autre découverte à 5 minutes à pied de là : celle de la Maison de fer de Poissy. Construite en 1896, cette maison toute blanche elle aussi, et faite de panneaux métalliques, ressemble à un mirage sur les hauteurs du parc Meissonier. On est tout de suite intrigué ! Jusqu'au 26 septembre, elle accueille elle aussi une exposition en partenariat avec Le Mobilier National, sur le design de métal. Y est présenté un ensemble d'œuvres et de prototypes en métal également conçus par l'Atelier de Recherche et de Création (ARC) avec des concepteurs contemporains. Une visite courte elle aussi, qui peut se poursuivre par une petite sieste au soleil dans le joli parc Meissonier.
1 - Chaise Martin Szekely 1993 2- Fauteuil de salle de spectacle Roger Legrand 1964