Le ministre des domaines, du cadastre et des affaires foncières a engagé la réimmatriculation de terrains appartenant à des tiers, en bafouant des décisions de la plus haute juridiction du Cameroun.
Henri Eyebe Ayissi vient d’attribuer des titres fonciers à Kribi sur des terrains bénéficiant de titres fonciers existants. Il s’agit notamment de nouvelles propriétés attribuées après annulation du titre foncier N°361/O. Lequel, en qualité de titre mère, englobe plusieurs autres titres fonciers issus du morcellement. Le ministre des Domaines, du cadastre et des affaires foncières (Mindcaf) ignore ainsi une sentence de la Chambre administrative de la Cour suprême prise le 12 juin 2019, qui confirmait le jugement N°201/2018/TA-Ydé du 1er aout 2018du Tribunal administratif du Centre. Laquelle annule l’arrêté annulant le titre foncier N°361/O du 14 octobre 2016 du Mindcaf.
Au moment même où une des victimes, Pierre Orly Tantchou, a fait une «tierce opposition » à cette procédure de réimmatriculation. Le Camerounais vivant aux Etats-Unis, a ainsi obtenu une « prénotation judiciaire » en janvier dernier auprès de la conservation foncière de Kribi. Ce « pour rendre temporairement inopérable toute transaction sur ce titre en attendant la décision pendante au tribunal administratif d’Ebolowa ». Pas que l’homme qui se bat contre le «vol» de son terrain depuis près de dix ans, doute éventuellement d’une issue autre que celle espérée, à savoir « qu’on me laisse poursuivre mon chantier sur mon terrain ». En réalité, « j’ai déjà une décision de la Cour suprême qui m’est favorable, mais je ne comprends pas l’entêtement des ministres en charge du domaine, à refuser de se soumettre à la décision de la justice camerounaise », regrette l’homme qui avait engagé un projet hôtelier avec des partenaires qui l’ont aujourd’hui abandonné, las d’attendre simplement l’application des décisions de justice.
Sur les pas de Koung à Bessike
C’est que le conservateur n’a pas inscrit cette prénotation dans le livre foncier, alors que le dossier a été versé dans la procédure pendante devant le tribunal à Ebolowwa, fait-il observer. «Ce qui est une faute très lourde à partir du moment où une prénotation sert de mesure conservatoire et dès lors qu’elle est signifiée, elle doit être inscrite dans le livre foncier; cela doit en principe bloquer toute transaction sur le titre foncier en question», explique un avocat. Mais comme l’avait déjà fait Jacqueline Koung à Bessike en son temps, Henry Eyebe Ayissi marche sur la justice et avance vers la spoliation des droits des détenteurs de titres issus du titre N°361/O datant de 1976, selon l’Ordonnance de 1974 sur le Régime foncier de l’Etat, mais qui en réalité existe depuis 1969 selon le modèle des transactions et accords de l’époque. Toujours est-il que le Mindcaf veut annuler un titre foncier vieux de plus de 50 ans par un
Selon la documentation et les informations obtenues de sources concordantes obtenue par La nouvelle expression, la réimmatriculation des domaines objet d’une querelle pendante devant divers tribunaux, a été ordonnée par le Mindcaf en personne, sur la base d’une simple lettre. Une instruction que l’ancien Conservateur foncier de l’océan avait refusé d’appliquer à l’ère de Jacqueline Koung à Bessike, prédécesseur d’Eyebe Ayissi au Mindcaf. Christian Nna Alémi, l’actuel conservateur, n’a pas hésité à se soumettre à l’arbitraire.
Scandale, s’exclame une des victimes: «Qui dit Cour suprême dit définitif. Il est claire que la même juridiction ne peut pas avoir deux décisions diamétralement opposées sur la même affaire». En clair, Henry Eyebe Aysissi et le conservateur foncier du département de l’Océan, se sont substitués à la justice pour défier la Cour suprême. C’est un dossier que votre journal suit depuis un peu plus de deux ans.