Fondement
“Was bleibet aber, stiften die Dichter”
Hölderlin, Andenken, 1803
On médite le souvenir de la belle Garonne, des activités sur ses rives, on écrit : « Mais ce qui demeure, le fondent les poètes ». Peut-on encore nourrir cette assurance ? Peut-on encore entretenir cette pensée ? Il faut l’éprouver, j’en fais l’expérience lente en deux temps, trois mouvements :
1. Le poète fonde ce qui demeure
2. Le poème fonde le poète
Comment cela se fait-il ?
Le poème n’est pas un résultat, il n’est pas l’addition de ses mots, la somme de ses matériaux. Avant les lignes, il y avait un espace, une « enveloppe », une tonalité d’ensemble. Les matériaux seront absorbés dans le poème. Tant qu’il se développe, le poème honore son enveloppe.
Les choses demeurent parce qu’il y avait au commencement une mise en demeure du poète. On recueille ce qu’on a semé ? C’est le contraire : j’ai, au départ, le champ éclos, donné ; je vais chercher les graines. Il y avait quelque chose avant le poème terminé, et déjà poème, n’est-ce pas ?
Claude Minière