Le skieur de pente raide Paul Bonhomme vient de boucler sont projet qui visait l'ouverture à ski de 10 pentes entre la France, la Suisse et l'Italie au cours d'un même hiver. Après 5 mois de descentes suspendues, la dernière descente dénommée X (950 m, 5.4/E4) sur le Täschhorn (4 491 m) suisse, clôt ce formidable challenge.
C'est en Suisse, du côté de la face Sud Ouest du Täschhorn que Paul Bonhomme aura bouclé son projet en compagnie de Vivian Bruchez, fidèle co-équipier à qui on l'associe immédiatement.
La ligne dénommée X est cotée 5.4/E4 pour 950 m de dénivelé. X comme l'inconnue que représentait cette face pour les deux skieurs de pente raide. X comme la dernière des 10 inconnues de ce "10 X Project".
Tout au long de l'hiver, les passionnés de montagne et de ski ont pu suivre l'avancement de ce projet au travers des récits de Paul Bonhomme sur ses réseaux sociaux. Toujours avide de partager ses aventures, ses tentatives et parfois ses renoncements (car il y en a eu aussi) Paul Bonhomme prend le temps d'expliquer, de partager tout cela à sa manière dans de long post et avec beaucoup de vidéos.
Les réfractaires aux petits clips vidéos qui donnent le vertige et vous font vous accrocher à votre fauteuil peuvent tout de suite passer leur chemin car Paul en est coutumier.
Cependant c'est un vrai régal pour toutes celles et ceux qui aiment à suivre ce genre de performance et apprécie la précision et la maitrise du skieur dans cet univers où le gaz est omniprésent dans ces pentes suspendues...
Car c'est une vraie aventure que Paul Bonhomme a entamer au début de l'hiver 2021. Ce n'est pas moins de dix itinéraires d'ampleur complètement inédits qu'il réussit à ouvrir, sur des sommets souvent méconnus, et toujours sans assistance.
Même si les dix descentes sont toutes plus impressionnantes que les autres, l'une d'entre elles m'a particulièrement marquée. Le 1er avril, Paul accompagné de Vivian Bruchez descendait la face est du Combin de la Tsessette, 4 141 m dans le val de Bagnes en Suisse. Une descente impressionnante de 1200 mètres de haut, mixant un niveau d'engagement et une difficulté proche des plus grandes réalisations de pente raides dans les Alpes.
Si un jour vous avez l'occasion d'aller dormir à la cabane Chanrion au bout du lac de Mauvoisin, il suffira de lever la tête pour se rendre compte de l'ampleur de l'exploit.
Après son projet "Les 4 Faces" ainsi que ses nombreuses premières ou répétitions de haut vol (on se souvient entre autres de la descente du Nant Blanc) Paul Bonhomme s'impose à sa manière comme un des skieurs et alpinistes les plus complets des années 2020.
Alors que nous avons passé deux hivers très particuliers, faits de confinement et de semi-confinement, que ce fut agréable de suivre cet élan passionné, tenace et inspirant que Monsieur Paul Bonhomme a su nous faire partager. Même si nous ne sommes que des spectateurs admiratifs de ces "prouesses suspendues" et qui ne seront jamais à la portée de nos spatules, il a réussi à démonter que la montagne est une histoire de voie que l'on peut se tracer, à force de pugnacité, d'exploration et d'imagination. Merci Paul et bravo.
→ Le projet 10 X se compose des 10 descentes suivantes :
- Le jardin secret (650 m, 5.4/E4), sur la pointe de Blonnière (France - Aravis)
- Éperon des Saltimbanques (1 200 m, 5.4/E4) dans le Valgaudemar (France - Écrins)
- Il segreto di Maira, Rocca Bianca de Acceglio (5.3 / E4 / 1 100 m) (Italie - Val Maira)
- Les Larmes d'Ulysse " (5.3/E4 - 600 m) en face nord-ouest du Mont Pélago (2 768 m) (France - Vésubie)
- La testa tra le stelle (5.3/E4 - 1 000 m) en face sud-est de la Tête Carrée (Italie - Val d'Aoste)
- Face est du Combin de la Tsessette (4 141 m) (Suisse - Val de Bagnes)
- La traversée des Anges (600 m, 5.4/E4), sur la face ouest du Pouzenc, 2 898 m (France -Embrunais)
- Merci Mamans (900 m, 5.4/E4) sur la face sud-ouest du Bietschhorn, 3 934 m (Suisse - Loteschental)
- X (950 m, 5.4/E4) Täschhorn, 4 491 m (Suisse - Valais)
Sur son compte Facebook, Paul Bonhomme décrit ce projet avec ces mots qui disent beaucoup du personnage :
Il m'est difficile de rendre compte d'un tel projet. Cela va me prendre du temps. Il faut s'imaginer un terrain de 2 fois la superficie de la Suisse. Il faut s'imaginer les mois d'automne à s'entrainer, à préparer, les milliers d'heures à déchiffrer les cartes, les topos, les photos, à défricher les bulletins météo de 3 pays, à chercher les comptes-rendus, à s'entrainer, repasser et repasser encore la lime sur les carres, faire les skis, préparer le sac, le refaire... encore. Puis les avalanches qui commencent et la neige qui tombe de travers, le sirocco, les siroccos, la chaleur puis le vent, où ? Comment ? S'entraîner encore, pas trop. Continuer à défricher, une permanente concentration pour ne pas faire la pente de trop, ou pas celle-là, le virage de trop, renoncer, se reposer pour être prêt à tous moments, c'est quoi les dernières actus sur le COVID ? En France ? En Suisse ? En Italie ? Organiser le boulot, les clients : où je les emmène ? Et les enfants : je peux les emmener à l'école, l'école à la maison ... il faut tondre la pelouse, l'anniversaire de ma chérie : lui offrir un beau week-end ! Quand ? quel temps fera-t-il ? Où ? C'est quoi les dernières actus sur le COVID ? Et repartir, sans demi-mesure, sans " c'est pas grave, on peut prendre un bout de motoneige ! " ... on nous a même proposé de partager un hélico ... non ! On n'entre pas en montagne comme on envahit un pays !