Christophe Rauck, 1996.
" Aujourd'hui, ce qui devient compliqué, c'est qu'on ne veut regarder la société qu'à travers une segmentation. Mais le théâtre n'a rien à voir avec l'actualité, il a à voir avec le présent. Et notre rôle est de ramener les grands textes au présent. C'est pour ça que je déteste, et même je suis en guerre avec ceux qui prônent l'arrêt des textes au théâtre. penser le monde demande d'avoir les outils pour poétiquement imaginer le monde que l'on pense. En cela, les auteurs sont puissants. Il faut être tellement bête pour penser que le "corps", la danse, vont remplacer le texte. Le théâtre et la danse se nourrissent mutuellement. C'est vraiment l'histoire des de Bourdieu, ce sont les gens qui connaissent les textes, qui les ont reçus, qui décrètent aujourd'hui que l'on n'en a plus besoin. Mais il y en a plein qui n'y ont pas eu accès, et qui aimeraient les connaître, et on s'en fiche. Il y a une vision néo-fasciste de ces espèces de petits-bourgeois, [...] qui décident qu'il n'y aurait plus de grand texte au théâtre. Ce sont les nantis qui décident ce qu'il faut voir, ou ne pas voir, pour faire partie du petit club des intelligents. Je n'aime pas ces espèces de vieux cons qui se croient jeunes en pensant à la place des jeunes en annonçant que l'oeuvre littéraire est morte et que la "création spontanée " doit primer... "
Christophe Rauck, extrait d'un entretien donné au magazine Transfuge n°147, Avril 2021.