Souvent, quand on médite, le problème est le surgissement des pensées, des mouvements en général, qui viennent troubler notre repos. Plus on observe, plus on "entend" des pensées nombreuses, comme une radio qu'il serait impossible d'éteindre. On essaie d'être indifférent, de prendre du recul, mais il reste difficile de rester neutre. Et à quoi bon pratiquer la méditation ?
D'un autre côté, nous savons bien qu'il y a aura toujours des pensées qui surgiront. Plus ou moins, mais il y en aura toujours, et cela dépendra en grande partie des circonstances. Même une personne qui aura médité toute sa vie aura des pensées. Peut-être un peu moins, mais il y en aura. Même si je parviens à un certain repos sans pensées, les pensées reviendront, car rien n'est permanent. A quoi bon la méditation si tout est impermanent ?
Alors que faire ?
La façon dont les pensées surgissent ne dépend pas de notre pratique de la méditation. En revanche, la façon dont elles disparaissent dépend de notre pratique de la méditation.
La méditation n'agit pas sur la manière dont les pensées apparaissent, mais sur la manière dont elles disparaissent. D'ordinaire, les pensées (et tous les autres petits mouvements ou petites réactions qui peuvent nous agacer) provoquent des tensions, qui elles même engendrent d'autres tensions... et ainsi de suite.
Voici donc la solution :
Plutôt que de placer mon attention sur le surgissement des pensées, je porte attention au fait que les pensées disparaissent. Quoi qu'il arrive, les pensées arrivent, puis s'en vont. C'est la beauté de l'impermanence. Je constate que je n'ai rien à faire pour que les pensées s'en aillent. Elles disparaissent d'elles-mêmes. Spontanément, sans effort. Le seul "effort" de ma part est un placement de l'attention vers la disparition des pensées.
Instant après instant, les pensées se défont, comme des nœuds, comme une fumée qui se disperse. Elles sont englouties dans le vide. Par ce simple et doux déplacement de l'attention vers un autre point du flux, ce flux est ressenti autrement : Une détente de plus en plus profonde apparaît. Je ne suis plus la victime des pensées : Je suis l'immensité silencieuse qui les dévore, sans faire le moindre effort. Un confiance surgit, qui remplace peu à peu le sentiment de lutter contre l'impossible. L'impermanence devient une alliée. La nature des choses, la réalité devient une amie.
Tout s'en va. Je suis le Temps qui engloutit toutes choses. Rien ne peut me submerger. Je suis l'espace en lequel tout vient se dissoudre inéluctablement. Parce que je fais des efforts ? Parce que je suis doué ? Parce que je suis discipliné ? Non. Parce que telle est la nature des choses. La porte s'ouvre d'elle-même.
Je suis le vide vivant qui dévore tout, je suis la fin de tout. Tout ce qui apparaît, disparaît. Tout ce qui est fait, est défait. Tout ce qui a un début, a une fin. Tout ce qui naît, meurt. Tout nœud se dénoue. La paix est donc inévitable. Le repos est naturel.
Mais il faut observer la fin, non le commencement. La grande ouverture. L'immensité où tout s'écoule, où tut se détend. Je suis la présence indéfinissable en laquelle tout vient s'ouvrir, je suis une bouche infinie, une panse inépuisable.
L'impermanence est le secret de la méditation.