Il n’est pas indispensable de connaître le texte de Pouchkine pour lire le livre de Clémentine Beauvais, Songe à la douceur, qui adapte l’histoire d’Eugène Onéguine à notre situation.
Eugène a 17 ans quand il rencontre Tatiana, qui en a 14. Elle, c’est la soeur d’Olga qui vit une histoire d’amour avec Lensky, l’ami d’Eugène. Clémentine Beauvais s’attache — et nous attache — à Eugène et Tatiana qui se retrouvent par hasard sur la ligne 14 du métro dix ans après leur première rencontre. C’est l’occasion de nous faire passer par ces deux époques (2006 et 2016) et de voir comment les protagonistes ont vieilli. C’est aussi l’occasion de regarder, avec des yeux de jeune adulte, ce qu’on était adolescent. La manière dont on s’engage dans la vie à tel ou tel âge. Ce que la technologie fait aux désirs et à l’attente. Ce qui réveille, par surprise, des sentiments qu’on croyait oubliés.
Et l’écriture de Clémentine Beauvais, dans une prose versifiée, donne beaucoup de plaisir à la lecture. Par ses rythmes, ses rimes parfois, la disposition des mots sur les pages, l’inscription de cette histoire dans notre présent. Paru d’abord dans une collection pour adolescents (éd. Sarbacane), il serait dommage de réserver ce livre à ce public tant il parle à tout âge. Et, franchement, on ne s’y ennuie pas.
Il arrive que l’autrice intervienne au cours du récit pour interpeler le lecteur, la lectrice, installant ainsi une connivence bienvenue.