A 33 ans, ce jeune homme vend les ceintures de seconde main à Nkololoun pour subvenir aux besoins de sa famille.
Il ne peut tenir plus de trente secondes de conversation sans jeter un coup d'œil furtif de part et d'autre de la chaussée. Roméo Djonkou est visiblement en alerte. Il surveille le passage des véhicules anti-émeutes de la police qui détruisent tous les comptoirs établis au bord de la route au marché Nkololoun. Son comptoir à lui, c'est une sorte de support fait à base d'une tige métallique et de petits morceaux de fer soudés. Il y a disposé des ceintures. Déjà trois ans que Roméo Djonkou est spécialisé dans ce petit commerce à Nkololoun. Pour se ravitailler en marchandise, le jeune homme de 33 ans se rend dans les déballages et effectue des tris. Les pièces de friperie retenues, il les revend. Les prix chez lui varient entre 200 et 1000 F. Cfa.
Lorsque les affaires sont bonnes, le petit débrouillard peut s'en tirer avec la somme de 3500 F. Cfa en poche. A cette somme, il faudra encore y déduire 200 F. Cfa pour frais de magasinage journalier dans une boutique du marché. Il faut pouvoir aussi y dégager 800 F. Cfa de transport entre Logbaba et Nkololoun. Sans oublier de mettre de côté de quoi s'alimenter le long de la journée de vente. Pour Roméo Djonkou, il n'est pas évident de joindre les deux bouts. Lui qui vit en location dans un studio se plie en deux pour subvenir aux charges de sa femme et son enfant âgé de deux ans. L'équation est devenue encore plus difficile à résoudre depuis que le petit commerçant a appris qu'il faudra débourser la somme de 100 000 F. Cfa pour occuper un des carreaux matérialisés sur les bords de la chaussée par la mairie de Douala 2ème.
Unique gagne-pain
"Il y a plusieurs débrouillards ici qui n'ont pas 5 000 F. Cfa de fonds de commerce. Demander de payer 100 000 F. Cfa, c'est demander de réaliser l'impossible. On sait qu'on ne peut rester ainsi gratuitement. Si l'on institue encore des tickets journaliers de 100 F. Cfa, ça passerait mieux ", propose le vendeur, l'air dépité. Il présente son petit comptoir de ceintures comme son unique gagne-pain. Une activité vers laquelle il s'est retourné après l'obtention de son Brevet d'étude du premier cycle (Bepc). Faute de moyens financiers pour poursuivre les études, Roméo Djonkou va se lancer dans le commerce ambulant de ceintures. Il passe dix années à faire du porte à porte à travers la ville. Lorsqu'il trouve ce petit espace au bord de la chaussée aux côtés d'autres confrères il y a trois ans, il décide de s'y établir. Il doit serrer la ceinture chaque jour.