L'imagination des investisseurs est sans limites pour réveiller l'avidité humaine. Parce qu'il est difficile, voire impossible pour beaucoup de posséder une œuvre d'art ou un produit de luxe inaccessible, des plateformes comme Rally, Collectable, Masterworks, Otis et d'autres..., proposent la propriété fractionnée, un concept qui permet d'acheter " un morceau de luxe " sans posséder le moindre objet. Sans en avoir l'usufruit, la possession en propre, le droit de jouissance, la " propriété " est totalement virtuelle. Le luxe fractionné et monétisé se réduit à une spéculation sans émotion, un investissement comme la bourse où les fluctuations répondent à des ressentis émotionnels et des analyses (supposées) rationnelles. Le degré zéro de la convoitise réduite à un placement froid sans âme.
Les animateurs de ces plateformes évoquent l'émergence de " collectionneurs d'un nouveau genre " qui accèdent à un nouveau marché et diversifient ainsi leur portefeuille. Or, un collectionneur, un vrai, s'attache à l'objet qu'il a convoité et possède, tout comme le client des marques de luxe qui recherche une forme de vertige à payer cher un objet exceptionnel dont il rêve. Dans un de mes livres, Envie de luxe, publié en 2009 aux Editions du Chêne, j'avais écrit que " le luxe klaxonne pour que l'individu fanfaronne ", avec la propriété fractionnée, aucune démonstration, aucun plaisir, sinon faire du fric, seul derrière un écran.